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Evolutions climatiques : l'agriculture se prépare

Une journée pour comprendre le climat et ses impacts sur les pratiques agricoles dans les trente prochaines années. Une initiative de la Chambre d'agriculture de l'Allier pour tenter de répondre à la question « Comment adapter nos exploitations et nos territoires au changement climatique ? ». Un véritable challenge pour l'Allier.

Il y avait environ 200 personnes en la salle Capdevielle, à Montmarault. Agriculteurs venus de l'ensemble du département de l'Allier mais aussi étudiants des lycées agricoles de Neuvy et de Durdat-Larequille ainsi que des élus des collectivités. Tous intéressés par le thème de cette «  journée climat » organisée par la Chambre d'agriculture de l'Allier. Un choix motivé pour Patrice Bonnin, le président de la Chambre d'agriculture de l'Allier : « nous devons nous accaparer le thème de l'évolution climatique et ne pas laisser les idéologues en parler. Il s'agit d'un sujet qui nous concerne directement nous, agriculteurs, mais aussi les collectivités que nous avons invitées à participer à cette journée. Nous avons présenté les vrais chiffres, les vraies études. Nous avons la chance d'avoir des gens compétents, avec un certain nombre d'années de recul, qui ont étudié de près ces phénomènes ». Des chiffres récoltés et interprétés par Vincent Cailliez, climatologue :
« la particularité de notre approche est basée sur les évolutions climatiques réellement enclenchées sur le terrain. Certes, nous avons des observations récentes mais nous, nous sommes remonté jusqu'en 1980 car c'est à partir de la fin des années 1970 que le changement climatique a connu sa forte accélération que nous connaissons sur l'ensemble de la planète et plus particulièrement sur l'Europe de l'Ouest. Nous nous basons donc sur la trajectoire climatique réellement enclenchée pour ensuite fabriquer des projections climatiques jusqu'à échéance de 2050. Une échéance assez courte mais qui correspond à la durée de vie d'un exploitant sur son exploitation mais aussi à une période pendant laquelle les projections sont indépendantes des scénarios d'émissions de gaz à effet de serre. Nous nous sommes donc intéressés à l'adaptation, à ce qui est inéluctable ».

Rassembler agriculteurs, jeunes, enseignants et acteurs des filières et des territoires
Des agriculteurs qui doivent s'emparer de ce thème pour pouvoir mieux s'y adapter : « ils s'y adaptent depuis longtemps déjà. Ils l'ont déjà fait lors de l'après-guerre, lors des grandes années de production dans les années 1970 et 1980. Aujourd'hui nous devons désormais nous adapter aux évolutions climatiques. C'est dans l'ADN du monde agricole ! Il doit cependant être accompagné dans le temps à travers la recherche et ses essais. Alors, oui, la prise de conscience du monde agricole est présente » précise Patrice Bonnin tout en ajoutant que « les Chambres d'agriculture ont pour rôle d'accompagner les agriculteurs et plus largement les agricultures de demain. Nos techniciens sont sur ces modèles. Il n'y a pas que la production en elle-même. Il nous faut adapter nos systèmes tout en n'oubliant pas l'aspect économique ».
Les professionnels de l'agriculture qui sont les premiers partenaires pour construire cette nouvelle agriculture. Une idée que partage Vincent Cailliez : « Si je suis parmi eux c'est grâce à eux. Si j'ai été recruté en 2012 par la Chambre d'agriculture de la Creuse, c'est bien qu'il y avait un certain nombre d'agriculteurs qui avaient d'ores et déjà compris, malgré le scepticisme ambiant à l'époque, qu'il fallait s'engager dans l'adaptation à ce qui commençait du changement climatique ».
Un véritable plan d'action qui se dessine pour le monde agricole qui doit être soutenu par les collectivités et par l'État. Le président de la Chambre d'agriculture de l'Allier émet des espoirs en leur direction : « C'est un thème qui est devenu électoral aujourd'hui et nous ne sommes pas sur la même échelle de temps. Pour pouvoir s'adapter, il nous faut du temps, du travail sur le terrain. Il nous faut un véritable modèle plus efficace, plus résilient, et c'est d'abord à nous de nous emparer de ces problématiques. Les politiques suivront pour proposer des choses concrètes et cohérentes ».

Le projet AP3C, contexte et résultats climatiques
Des leviers d'adaptation peuvent être mis en oeuvre comme l'explique Amélie Bouchant, conseillère au service technique élevage à la Chambre d'agriculture de l'Allier : « C'était l'objet de cette journée et du programme que nous menons à la Chambre d'agriculture de l'Allier depuis des années, notamment à travers notre projet de recherche et développement « adaptation des pratiques culturales au changement climatique » (AP3C). Nous ne pouvons retenir qu'un seul levier mais vraiment une variabilité au niveau de tous nos systèmes qu'ils soient ovins, bovins, cultures, etc. Il y aura plusieurs adaptations à mettre en place ». Des pistes, Amélie Bouchant en a plusieurs sous le coude : « Le changement climatique a un fort impact sur les températures printanières provoquant une avancée des stades comme la récolte d'herbe où une anticipation est à prévoir mais aussi un changement de variétés. Il y a également la possibilité de mettre en place l'irrigation de sécurisation avec la création de retenues ou l'utilisation de celles qui existent déjà. Des leviers parmi tant d'autres ».

Un phénomène à l'oeuvre globalement et localement
Des prévisions, à l'horizon 2050, qui se dessinent et que Vincent Cailliez a exposé lors de cette journée : « Le scénario que nous suivons dans le cadre du projet AP3C est un scénario à minima. Il se présente comme une poursuite de la tendance engagée depuis les quarante dernières années. D'une manière très graduelle, nous sommes sur une augmentation de 0,4°C tous les dix ans en température moyenne annuelle. Cela ne dit pas grand-chose mais nous aurons des impacts plus forts sur des valeurs extrêmes qui augmentent deux fois plus vite que les valeurs moyennes. Concernant les précipitations, en cumul annuel, il y a peu d'évolutions mais, en revanche, nous sommes sur des concentrations de celles-ci. Prenons l'exemple de la saison estivale, il pleuvra autant, voire un peu plus, mais ces précipitions seront concentrées sur des épisodes plus brefs et plus intenses ».
Des évolutions climatiques qui se ressentent encore plus fortement dans certaines régions françaises : « Là où socialement c'est plus difficile, c'est sur les territoires en transition. Quand vous êtes en zone méditerranéenne, vous avez l'habitude des fortes températures et vous êtes culturellement adaptés à ce qui se passe. Dans les zones où vous aviez l'habitude de températures plus fraîches et humides, c'est là où c'est sans doute plus difficile. La chance du Massif Central, dans son ensemble, est d'avoir un étalement dans les altitudes, ce qui fait que l'adaptation est moins difficile que si vous êtes en plaine car le climat se décale moins vite sur le paysage. En plaine, ce climat, il se décale de 100 à 150 km tous les dix ans. Ce qui fait beaucoup, surtout dans la vie d'un agriculteur de trente ans ».

Un challenge pour demain
Amélie Bouchant insiste sur le fait que « le travail a été fait sur le calcul de la trentaine d'indicateurs sur l'herbe, la culture de céréales, de maïs. C'est vraiment le point essentiel pour anticiper ces changements permettant d'adapter nos exploitations dès maintenant ». Une suite de ce travail qui se traduira par « une communication plus large envers le monde agricole pour pouvoir anticiper les choses mais aussi une logique d'études prenant en compte d'autres indicateurs. Nous avons désormais tous les outils en notre possession pour pouvoir amener nos agriculteurs à réfléchir sur leurs propres systèmes. Collectivement, individuellement, nous avons la possibilité de le faire. C'est toute la continuité du projet qui est en cours » ajoute Amélie Bouchant. « Je crois beaucoup à la recherche, à l'évolution des variétés. Les variétés de maïs semées il y a vingt ans sont complètement dépassées. Aujourd'hui, les nouvelles sont capables de résister au stress hydrique, à la chaleur. Les semenciers ont également travaillé sur la précocité. Il faut leur laisser du temps et, peut-être que des plantes que nous n'imaginions pas semer chez nous aujourd'hui, peut-être que demain elles seront parfaitement adaptées à nos territoires dans quelques années, sous forme de mélanges, d'associations » insiste Patrice Bonnin.
La présence de nombreux jeunes lors de cette journée met en avant le rôle incontournable de l'éducation dans ces adaptations face aux évolutions climatiques pour transmettre les connaissances nécessaires aux futurs agriculteurs et à ceux qui les conseilleront dans les années à venir.

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