AMF 15 : Gestion de l'eau, déjà dans l'urgence
Réunis en assemblée générale à Saint-Flour, les maires du Cantal avaient un sujet d'actualité tout trouvé avec la gestion de l'eau dans l'avenir. Un sujet de plus en plus prégnant pour les communes.
préoccupante.
Samedi 14 octobre, à Saint-Flour, un peu plus de 160 élus du Cantal participaient à l'assemblée générale de l'Association des maires de France. Un moment toujours attendu pour prendre le pouls des collectivités auxquelles la population reste très attachée.
Des projets aux finances, de la responsabilité des élus aux évolutions de la législation... les sujets ne manquent pas et l'AMF Cantal tente d'apporter, autant que faire se peut, un accompagnement de terrain auprès des représentants des communes.
Pour cette journée, l'association avait souhaité aborder la gestion de l'eau en prémices du transfert de la compétence aux intercommunalités à l'horizon du 31 décembre 2025. Au-delà de
l'aspect technique et législatif, l'évolution climatique de cette année est venue apporter une dimension d'urgence pour garantir la ressource en eau, en quantité et en qualité. Les prévisions sur les deux prochaines décennies ne permettent pas de rester attentiste.
Une situation qui se dégrade
Les différents intervenants à la table ronde ont fait état d'une année 2022 marquée par un manque de précipitations, une longue période caniculaire et donc une sécheresse, la seconde depuis 2019. Ces conditions climatiques deviendront la norme à l'avenir. Pas un mois n'a été dans les normales saisonnières. Le Cantal a enregistré une baisse des précipitations de 35 %. Mathieu
Greffier, de l'agence de l'eau Adour-Garonne avançait pour l'ensemble du bassin versant du Grand Sud-Ouest un déficit estimé à 1,2 milliard de m3 d'eau en 2050.
La biodiversité va, on peut déjà le constater, être impactée. Mais l'activité humaine également. Cette année, la sécheresse n'a épargné aucune zone du Cantal : 48 % des communes cantaliennes ont connu une situation inquiétante pour leur alimentation en eau ; 21 % d'entre elles ont rencontré des problèmes de distribution, obligeant à une solidarité entre communes pour assurer l'approvisionnement des habitants par camions citernes.
Quantité et qualité en baisse
Autre élément clé, Jean-Baptiste Doré, du conseil départemental du Cantal, mettait en lumière l'état des moyens actuels : 1 085 points de prélèvements, 1 279 réserves, 7 000 réseaux mais aussi un rendement moyen sur le département de 70 % compte tenu des fuites (20 % pour le plus médiocre). Tout ceci est géré par deux intercommunalités (Cère et Goul et la Caba), 20 syndicats et 120 communes en direct. Le prix du m3 varie de la gratuité à 3,86 EUR, ce qui représente un problème dans l'optique de rapprochements comme l'imposerait le transfert de compétence en 2026.
Avec moins de précipitations se profile aussi la détérioration de la qualité de l'eau potable, présentait Sébastien Magne, de l'Agence régionale de santé. De nombreux réseaux ne bénéficient d'aucun traitement. Les nombreux équipements d'épuration qui ne sont pas aux normes ou défectueux aggravent les risques de pollution des cours d'eau lors de périodes d'étiages de plus en plus longues.
"Il y a un besoin d'accélérer pour faire mieux demain et nous adapter au changement climatique", signalait Nicolas Meyer, de la DDT.
Le transfert de compétence souhaité par l'État devient donc d'une actualité "brûlante" pour les élus. La recherche de solutions pour garantir et la ressource et la qualité se transforme en priorité, comme le rappelait Laurent Buchaillat, préfet du Cantal, lors de son intervention.
Même s'il persiste des divergences de points de vue sur la forme, l'amélioration des réseaux, le conseil, la planification, la mise aux normes des systèmes d'épuration, l'interconnexion entre communes déficitaires et excédentaires relèvent de chantiers que peu de collectivités pourront porter seules. "La taille critique est de 5 000 habitants, et il en va de l'intérêt général", partageait Bruno Faure, président du Conseil départemental, rappelant le soutien de sa collectivité sur ces projets.
Intérêt général
Certes, l'État sera là pour aider, tout comme le Département dans une volonté de mutualisation.
Avec l'eau, apparaît une notion de bien commun et l'urgence à adapter nos comportements pour une ressource essentielle, qu'il faudra de plus en plus savoir préserver et économiser.
Mais si tout le monde est d'accord, de nombreux maires se déclaraient, comme Christian Fournier (Saint-Martin-Valmeroux), contre le transfert de compétence imposé sans concertation. L'indépendance des élus pour le choix des solutions répondant aux besoins locaux est une vision défendue par les sénateurs Bernard Delcros et Stéphane Sautarel. Quid également de l'avenir des syndicats des eaux à cheval sur plusieurs communautés de communes, questionnait Jean-Marc Boudou (Védrines-Saint-Loup).
Patricia Rochès (Coren) et Bernard Coudy (Gourdièges) s'inquiétaient de l'accroissement des forages privés liés à une hausse des tarifs de l'eau et la demande aux agriculteurs de sortir du réseau d'eau potable pour l'abreuvement des animaux. "Ceux qui ont fait ne seront-ils pas pénalisés par ceux qui n'ont rien fait ?", s'interrogeait Bernard Remise (Saint-Urcize).
"Cette journée ouvre le débat, notait Christian Montin. Nous devons anticiper pour ne pas agir dans l'urgence. Le dérèglement climatique nous invite à nous mobiliser collectivement et capables de nous organiser." "Une urgence d'agir de manière réelle et durable", selon le préfet du Cantal.