Alain Rousset face à la réalité du terrain
Les agriculteurs subissent depuis des mois une sécheresse sans précédent contraignant les éleveurs à affourager depuis la mi-juillet. Si la seule et unique récolte de foin de l’année est d’ores et déjà bien entamée, il apparaît évident que les stocks actuels ne suffiront pas pour alimenter les troupeaux jusqu’à la prochaine mise à l’herbe. Cette situation se cumule déjà malheureusement à plusieurs années de conditions climatiques défavorables et va impacter encore davantage la capacité de production des cheptels bovins creusois avec des risques de voir à court et moyen terme une décapitalisation du cheptel et une diminution des naissances liées à la baisse de la quantité de l’alimentation.
Par ailleurs, les éleveurs du nord de l’Europe, ayant eux aussi souffert de la sécheresse, ont importé beaucoup de paille et ont provoqué ainsi une hausse des prix et une spéculation importante sur tous les produits de substitution, rendant la situation économique des exploitations agricoles creusoises d’autant plus fragile.
Face à cette situation dégradée, les représentants des organisations professionnelles agricoles, Chambre d’agriculture, FDSEA et JA avaient demandé depuis longtemps au Président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine de venir en Creuse, constater par lui-même la réalité de la situation.
Une visite s’est donc déroulée le 1er octobre dernier sur l’exploitation du Gaec de la Rochetaillade à Saint-Priest-Palus.
Sur la ferme de 124 ha avec 82 vaches allaitantes limousines en système plein air intégral, qu’exploitent Thierry et Marie Rochetaillade, « plus de 800 bottes de foin ont été récoltées cette année dont 200 ont déjà été consommées par les animaux. À ce rythme, à la mi-janvier nos stocks seront épuisés, il faudra en conséquence acheter des fourrages à l’extérieur et on ne sait pas à quel prix… la spéculation est déjà en marche ! »
Mais au-delà des conséquences financières, la sécheresse aura aussi d’autres impacts sur le plan sanitaire et commercial. Sur le sanitaire, avec des bêtes de qualité médiocre et des vêlages compromis. Sur le plan commercial, on risque de voir une décapitalisation du cheptel et un afflux de bêtes sur le marché et par conséquent un effondrement des cours de la viande.
Pour le président de la FDSEA Thierry Jamot, « notre première demande porte sur la reconnaissance du département en zone sinistrée et d’autre part que le Conseil Régional soutienne financièrement les éleveurs pour passer ce cap difficile ». Même tonalité pour le président de la Chambre d’agriculture, Pascal Lerousseau qui ajoute : « la gestion de l’eau fait désormais partie des premières priorités à défendre… nous attendons beaucoup des collectivités territoriales sur ce sujet » a-t-il déclaré.
Le président du Conseil régional Alain Rousset a bien compris les messages légitimes des éleveurs creusois, mais en très bon politicien, aucune réponse concrète n’a été apportée.
« Les pistes de réflexion sont déjà engagées ou ont été entreprises sur le dossier de l’agriculture régionale… Il faut sanctuariser des terres arables » ou encore « il faut s’attaquer au dossier de la gestion de l’eau… » autant de sujets qui restent encore non précisés.
Son seul cheval de bataille est de « sortir d’une agriculture de compensation et la remplacer par une agriculture de l’innovation », tout le monde s’accorde sur ce principe, mais comment y parvenir et avec quels moyens ? Sur la question budgétaire, « il faut redéfinir le modèle agricole que l’on souhaite ». Si, pour Alain Rousset, « le modèle agricole actuel n’est plus de mise, en raison des changements divers et variés et en particulier sur le plan du climat, d’autres pistes restent à être explorées ». « Pour ces raisons, nous devons nous orienter vers une nouvelle agriculture. Nous avons vu que les effets de la PAC n’ont pas été très brillants, on doit maintenant raisonner autrement, notamment sur des circuits commerciaux différents et en particulier sur les circuits courts et les plates formes qui organisent la restauration collective, et à ce titre, le Conseil régional est prêt à s’engager ».
Une visite d’exploitation qui aura pris davantage une tournure d’ordre politique, plutôt que d’apporter des réponses concrètes aux éleveurs dans le besoin.