FDSEA et JA43
5 barrages filtrants pour alerter les politiques
À l'appel de la FDSEA et des JA43, plus de 250 agriculteurs ont manifesté mardi 15 septembre 2009 pour alerter les élus et les pouvoirs publics sur la situation désastreuse de l'agriculture. Ils étaient postés sur 5 barrages filtrants aux portes du Puy en Velay. Avec des tracteurs ils ont durant la journée bloqué les accès à la préfecture de la Haute-Loire en distribuant des tracts aux automobilistes. Cette action syndicale s'est déroulé dans le calme et la grande majorité des conducteurs victimes du blocage ont affirmé leur soutien à la cause paysanne. Les agriculteurs attendent des politiques des réponses concrètes et rapides.
Bloquer les entrées de la ville du Puy, tel était le mot d’ordre de l’action syndicale mise en place ce mardi 15 septembre par la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles et les Jeunes Agriculteurs de Haute-Loire. Ils étaient une cinquantaine d’agriculteurs sur chacun des 5 sites de blocage : les ronds-points de Lachamp et des Fangeas sur la RN88 et de Chaspuzac sur la RN102, aux carrefours de la Pierre Plantée et de Peyrard sur la D112.
Venus avec des tracteurs non attelés, selon la consigne donnée par les syndicats, ils se sont installés toute la journée depuis 10 heures du matin et jusque vers 16h30, sur ces lieux stratégiques. Ils n’ont jamais complètement bloqué les routes, mais ils ont ralenti la circulation en distribuant des tracts aux automobilistes ; tracts sur lesquels étaient clairement inscrits des slogans forts tels que «Nos politiques ne font rien», «les éleveurs sont à l’agonie».
Élus et pouvoirs publics pour cible
Comme l’explique Gilbert Guignand président de la FDSEA, cette opération visait avant tout les élus et les pouvoirs publics. «Nous voulons leur mettre la pression». Et d’expliquer : «On ne sortira pas de cette crise par un coup de baguette magique… Nous attendons un Plan d’Urgence rapide, simple et efficace, et ce pour toutes les productions. Il faut que l’argent soit sur les comptes des agriculteurs avant la fin de l’année 2009».
Jean Julien Deygas président des JA43 enfonce le clou : «Nos responsables politiques nationaux doivent prendre leurs responsabilités. Nous avons deux messages pour eux aujourd’hui : proposer un plan de sortie de crise pour toutes les productions et très rapidement, et faire respecter l’accord sur un prix du lait, obtenu en interprofession le 4 juin, à 280 € la tonne».
De nombreux responsables professionnels de la FDSEA et des JA étaient sur les sites avec leurs adhérents. Jean Michel Durand secrétaire général de la FDSEA, a précisé : «Nous avons délibérément choisi la ville du Puy en Velay. C’est la ville de Laurent Wauquiez, le représentant du gouvernement en Haute-Loire». Il ajoute : «Le gouvernement français, n’a pas pu se faire entendre le 9 septembre à Bruxelles. Il doit désormais prendre ses responsabilités s’il ne veut pas voir disparaître un pan entier de son économie».
Cette manifestation a aussi été une occasion pour les responsables d’entendre les producteurs crier leurs inquiétudes et exprimer leur lassitude. Sur les 5 sites, où les deux présidents se sont rendus, des discussions sérieuses, parfois âpres et animées, ont permis de mieux comprendre le contexte national et international mais aussi les spécificités de la Haute-Loire avec notamment l’enjeu Via Lacta, et de remettre dans ce contexte la position de la FDSEA et des JA.
«On est mal…»
«Il était temps» disaient certains manifestants qui n’en peuvent plus de rester chez eux et de subir la crise sans rien faire. Cette action leur permet d’exprimer leur désarroi. Joël producteur de lait à Chaspinhac est bien décidé à se faire entendre : «Le gouvernement doit prendre en considération l’ampleur du problème et débloquer des avances de trésoreries. On est au bord du gouffre…» et de poursuivre, «dans notre métier, quand une porte se ferme, elle ne se réouvre pas…». «On est mal…» ajoute un voisin. Et un autre encore : « dans cette situation très tendue, on est obligé de tirer sur toutes les cordes pour limiter les charges : frais vétérinaires, appro, matériel… On hypothèque l’avenir de nos exploitations».
Jean-Louis producteur ovin à St Etienne du Vigan semble résigné : «Entre nous agriculteurs, on ne parle que de la crise. Et les gens extérieurs au monde agricole ne comprennent pas nos problèmes. Du côté des décideurs, rien ne bouge… Nous devons interpeler les politiques pour obtenir au moins la même chose qu’en 2008, mais beaucoup plus vite». Norbert, producteur de lait, est dépité : «Aujourd’hui, on est obligé de piocher sur nos livrets pour payer les factures…». Mais il ajoute comme pour s’en convaincre : «Ça ne durera pas… ça ne peut pas durer.».
En fin de manifestations, et pour répondre aux attentes de leurs adhérents, les responsables professionnels ont insisté pour qu’ils viennent nombreux participer activement aux 4 réunions sur le dossier laitier prévues entre le 24 septembre et le 2 octobre, et aux prochaines rencontres proposées par la FDSEA et les JA, en octobre sur toutes les productions agricoles.
Les automobilistes se disent solidaires des agriculteurs
Des encouragements, un sourire… «Bon courage», «On vous soutient», «On comprend le malaise dans lequel se trouve le monde agricole»… Les conducteurs des voitures et camions pris dans les embouteillages créés par les agriculteurs en action syndicale, mardi 15 septembre, ont su pour la très grande majorité prendre leur mal en patience. Nombreux étaient-ils à formuler quelques mots d’encouragements à l’encontre des producteurs, même si certains étaient un peu énervés. Il faut dire aussi que beaucoup de gens de passage, altiligériens ou non, ont de la famille, plus ou moins proche, dans le milieu agricole. Alors même si souvent ils reconnaissent ne pas bien comprendre la situation, ils savent très bien que le travail des agriculteurs n’est pas rémunéré à sa juste valeur.
Au hasard des rencontres
Nicole, assistante vétérinaire à Pélussin dans la Loire, est bien consciente de la crise : «Je suis solidaire du monde agricole, j’ai un frère paysan et je travaille avec les éleveurs. La situation actuelle est très difficile, on va droit vers une disparition de la profession, et nous avec…». Marie-Paule, fonctionnaire en Haute-Loire «ne connait pas très bien la situation actuelle. Je sais seulement que vous travaillez dur et que vous n’êtes pas rémunérés en fonction… Je comprend, mais je n’accepte pas le fait de jeter du lait, alors qu’il y a trop de gens qui meurrent de faim». Sur un autre site, c’est un ancien petit producteur de lait de la Drôme, retraité depuis 6 mois qui se dit solidaire bien sûr mais avec un énorme sentiment de fatalisme : «j’en ai connu des actions syndicales, des manifestations, des grèves du lait… et on est toujours dans la même galère».
Bruno Le Maire annonce, au Space, une enveloppe de 30 millions d'euros
Le ministre de l'Agriculture, pour sa première participation, mouvementée, au salon de l'élevage Space de Rennes, a annoncé le 15 septembre une enveloppe supplémentaire de 30 millions d'euros aux filières d'élevage « pour aider les producteurs les plus en difficulté à faire face au déficit de leur trésorerie ». Le ministre a cité dans son intervention les « jeunes agriculteurs et les récents investisseurs des filières laitières et porcines ». « Cet effort financier de l'État » attend « un retour » de la part des producteurs. « J'attends que vous avanciez sur l'organisation et la structuration de vos filières » a-t-il ajouté. Autre annonce : un nouveau rendez-vous : « début novembre avec les banques, la MSA, les assurances et l'État ». L'objet de ce rendez-vous est « de faire le bilan des revenus 2009 des agriculteurs et d'en tirer toutes les conséquences ». Sur le plan européen, le ministre a annoncé le ralliement de la Suède, de la République tchèque et de l'Espagne aux « propositions solides et convaincantes pour une nouvelle régulation du lait faites avec l'Allemagne ». En plus, la Commission européenne « a accepté d'examiner nos propositions » a-t-il ajouté en concluant que « les lignes bougeaient dans le bon sens ».
Les responsables syndicaux insatisfaits
A chaud, après les annonces du Ministre de l’Agriculture, Gilbert Guignand réagit : «30 millions d’euros, ça représente 1 euro par 1000 litres de lait…». Les annonces du Ministre sont loin d’apaiser les esprits. Les responsables FDSEA et JA sont déterminés à poursuivre les actions, voire à les durcir, pour obtenir des mesures significatives. Ils continuent à mettre la pression pour trouver des solutions concrètes et rapides pour venir en aide à tous les producteurs de Haute-Loire, quelle que soit leur production. Ces demandes et ces propositions vont remonter à la Préfecture, à l’Association des Élus de la Montagne (en Haute-Loire jeudi), et auprès du Président Sarkozy via le Premier Ministre François Fillon (en Haute-Loire vendredi).