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« On forme un bon binôme avec ma salariée », affirme Antoine Thibault alias AgriSkippy

Installé en individuel dans l’Eure, Antoine Thibault recourt au salariat. Cette solution lui permet de travailler sereinement et de pouvoir se libérer, tout en restant seul pilote de l’entreprise.

La ferme du vieux château est vraiment perdue au milieu des bois… « Si je travaillais seul ici, je ne verrais personne à part le laitier ! », plaisante Antoine Thibault, qui emploie Marianne depuis six ans sur sa ferme située à Cintray, dans l’Eure. « On ne fait pas les choses ensemble, chacun sait ce qu’il a à faire et travaille de son côté en autonomie, mais j’apprécie d’avoir un partenaire de travail sur la ferme. Non seulement pour alléger l’astreinte, mais c’est aussi plus sympa au quotidien en termes de lien social. On n’est pas dans le même état d’esprit quand on arrive le matin. »

Ne pas trop investir pour pouvoir embaucher

Antoine s’est installé en individuel à seulement 24 ans. Il a décidé de reprendre l’exploitation de son père en 2002 alors que ce dernier cessait son activité pour se tourner vers le salariat. « J’étais jeune mais j’ai saisi cette opportunité car je voulais devenir mon propre patron. » À l’époque, la ferme produisait 240 000 litres avec 35 vaches en libre-service et 54 hectares, dont une trentaine en prairies permanentes. « Honnêtement, à ce moment-là, j’avais beaucoup de temps libre, se souvient-il. Mais au fil des ans, avec l’augmentation significative des volumes via les transferts de quota sans terre, c’est devenu plus compliqué de continuer à travailler seul sur l’exploitation. » D’autant que l’éleveur, ouvert et curieux par nature, apprécie de pouvoir se libérer et sortir de la ferme pour assurer ou recevoir des formations, participer à des groupes de progrès (chambre d'agriculture, BTPL) et prendre des engagements à l’extérieur (Sodiaal, Fédération). Hormis quelques stagiaires, Antoine a travaillé seul pendant huit ans, avant d’embaucher un apprenti en 2010 (2 ans), un autre en 2012, puis enfin Marianne en CDI en 2015.

 

 
Assez indépendant, l’éleveur n’a jamais songé à s’associer. « J’ai bien des collègues avec lesquels nous sommes très proches, mais ce n’aurait pas été pour autant une bonne idée de s’associer. » La perspective du robot de traite, se prêtant mal à son système pâturant avec une route à traverser, ne l’a pas non plus tenté. Par contre, dès son installation, il a choisi de limiter les investissements pour engranger de la trésorerie et « être en mesure d’embaucher une fois les gros emprunts terminés ». 

 

L’exploitation dispose en effet de peu de matériel et délègue les semis, traitements et chantiers de récolte à une entreprise voisine. Et lors de la mise aux normes, par exemple, l’éleveur n’a pas monté de racleurs. « Sur une ferme comme la mienne, il faut se demander ce qui est le plus important : acheter un matériel à 20 000 euros ou payer un salarié pendant un an ? Pour moi, le choix a été vite fait ! », avance-t-il avec un large sourire.

 

 
 © E. Bignon
© E. Bignon
Marianne est arrivée sur la ferme suite à une annonce qu’il a déposée à Pôle emploi. « J’ai pu bénéficier d’un contrat aidé. Pendant trois ans, je n’ai payé que le salaire net (15 000 €, au lieu de 25 000 €). En contrepartie, il fallait embaucher en CDI à temps plein, rapporte l’éleveur. Cette formule a été un bon tremplin. Cela m’a notamment permis de passer sur certaines choses les premières années et d’accepter que Marianne, âgée seulement de 19 ans à l’époque, se professionnalise petit à petit. » La conjoncture laitière haussière a aussi aidé à franchir le pas.

 

Moins de stress et de journées à rallonge

« Un salarié, ça change la vie !, apprécie aujourd’hui Antoine. Je travaille moins et j’ai moins de stress. Sans compter que quand tu es seul, le moindre pépin de santé devient vite une galère… Et puis, quand tu partages le travail, tu ne le vis pas de la même façon. » Sans salarié, par exemple, pas sûr qu’il pourrait autant œuvrer sur les réseaux sociaux pour valoriser l’image du métier d’éleveur. Ni s’accorder deux semaines de congés annuels, plus 3 à 4 jours de répit qu’il prend désormais à chaque période de vacances.

Concrètement, Marianne travaille huit heures par jour, quatre jours par semaine, et assure un week-end sur trois. Elle assure essentiellement le travail d’astreinte. « Quand elle est là, je ne m’occupe pas des bêtes, résume Antoine qui ne trait plus que six fois par semaine. Par contre, sur la partie élevage, je garde les tâches qui prennent autant de temps à faire soi-même qu'à vérifier qu’elles ont bien été faites, comme les déclarations des veaux, la programmation du DAC, etc. »

Organisation bien rôdée et efficacité au travail

 

 
 © E.Bignon
© E.Bignon
Faire vite et bien, voilà un credo qui convient bien au binôme. « Aussi bien l’un que l’autre, on cherche à être le plus efficace possible dans la réalisation de nos tâches quotidiennes », témoignent-ils. Passer le rabot prend 12 minutes par jour (7 min le matin, 5 min le soir) et alimenter le troupeau à la désileuse 25 minutes, la complémentation se faisant au DAC. La traite prend 1 h 15. Comme l’élevage a peu de mammites, l’impasse est faite sur les premiers jets. « Avec la 2x6, traire à deux ne servirait à rien. Cela mobiliserait une personne pendant une heure pour gagner dix minutes. »

 

Quant au fait d’embaucher une fille… « C’est un faux problème. Pour avoir travaillé avec des garçons très motivés par le tracteur, j’apprécie de bosser avec une fille. Marianne est très animalière. D’ailleurs, depuis qu’elle est là, les bêtes sont plus calmes. Même si elle a un sacré caractère ! », lâche-t-il, en adressant un clin d’œil complice à Marianne.

Chiffres clés

60 vaches à 10 500 kg
550 000 l produits
73 ha dont 63 ha de SFP
1 UMO salariée

À retenir

Les leviers :

- salariat
- délégation des cultures
- simplification

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