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Pays basque : les fruits et légumes « Made in pas loin » de Pierre Laporte

Pierre Laporte s’est installé sur l’exploitation qui a vu naître sa grand-mère. Son entreprise, qui grandit vite, ne s’écarte pas de ses bases : celles de productions locales, respectueuses de leur environnement et rémunératrices pour ceux qui les cultivent.

Pierre Laporte (à gauche) et Thomas Heguy, chef de culture voient l’agronomie comme une évidence du métier d’agriculteur.
© Guy Dubon

Cinquième génération de maraîchers de Tarnos et Boucau, dans la ceinture verte de Bayonne (Pyrénées Atlantique), Pierre Laporte s’est installé en 2015 en achetant la ferme Dache Dise, « laisse dire » en patois local, où était née sa grand-mère. Sur l’exploitation de 3,5 ha, le jeune producteur installe rapidement des abris, une serre multichapelle de 7 000 m2 et 3 000 m2 de tunnel. « J’ai fait le choix de partir sur des fruits rouges, fraise et framboise, même de la mûre que j’ai maintenant abandonnée », explique Pierre Laporte.

Le reste des terres de l’exploitation est destiné aux légumes de plein champ : pomme de terre, courgette, courge, radis… Et le tout est commercialisé en direct sur deux marchés hebdomadaires, auprès de revendeurs locaux et sur l’exploitation pendant trois jours par semaine. Les colis et les légumes de la ferme Dache Dise portent la mention « Made in pas loin » en bannière, comme une revendication d’une démarche qui va au-delà de produire local .

L’agronomie comme une évidence

Si au départ, la stratégie de production de Pierre Laporte est inspirée du modèle de l’exploitation de son père qui cultive 1 ha de fraise hors-sol, le jeune producteur s’aperçoit vite de la forte saisonnalité de l’activité, avec notamment l’obligation de reconstituer une équipe avec des compétences et recréer une bonne ambiance de travail tous les printemps. Afin de mieux répartir la charge de travail et proposer des périodes de travail plus longues à des salariés qu’il souhaite essentiellement recruter de manière locale, Pierre Laporte envisage une diversification de ses cultures et compte aujourd’hui une cinquantaine de légumes et aromates.

Sa stratégie passe par l’acquisition de nouvelles terres à travailler. Une tâche difficile dans la proche banlieue bayonnaise soumise à la pression foncière et touristique. Pourtant en 2018, il prend en fermage 7 ha de terre à Bayonne et 2,5 ha à Tarnos cette année. « On a beaucoup de travail d’amélioration du sol à faire en apportant de la matière organique et du vivant après trente ans de maïs sur maïs, la vie du sol est replacée au centre de nos priorités », mentionne-t-il. Car Pierre Laporte voit l’agronomie comme une évidence du métier d’agriculteur. « C’est un bon sens paysan qui vient aujourd’hui se traduire dans la notion d’agriculture durable », mentionne le diplômé d’un BTS et d’une licence en conseil de systèmes de culture en agroécologie. Une démarche qu’il partage avec Thomas Heguy, son second d’exploitation, chef de culture et camarade de promo. Car Pierre n’est pas un chef d’exploitation solitaire.

S’améliorer pour pérenniser des emplois

« L’enjeu des trois prochaines années est de bâtir une équipe, de fédérer des personnes et de s’améliorer pour pérenniser des emplois à l’année », explique-t-il plein de détermination. Représentant d’une nouvelle génération d’agriculteurs, il se refuse jusqu’à aujourd’hui « à faire appel à la main-d’œuvre étrangère » et « espère trouver les clés » pour intéresser sa génération à son métier.

La veille de notre visite, Pierre Laporte avait envoyé des offres d’emploi à l’Aneefa et réalisé une vidéo pour proposer un poste d’ouvrier agricole polyvalent à l’année. Alors même si le travail est difficile, parfois long et qu’il manque cruellement encore quelques bras, l’équipe constituée d'une quinzaine d’employés, trois permanents et des saisonniers, est jeune, souriante et dynamique. « On grandit vite et il y a tout à faire », commente Pierre Laporte. Mais cette croissance s’ancre dans la durée avec une réflexion autour de la qualité de travail et des produits qui en sont issus.

Passer d’une petite ferme à une exploitation

« Nous avons besoin d’équipement et de mécanisation, tracteur, bineuse, épandeur pour gagner en précision de travail, en qualité de production et réduire le temps passé et la pénibilité », liste-t-il. Idem pour l’irrigation. « J’ai commencé avec des moyens d’irrigation très légers et une simple adduction à l’eau de ville. Aujourd’hui, je prévois de créer une réserve de 2 500 m3 alimentée par les eaux pluviales de ma serre », mentionne l’investisseur. Car pour concrétiser ses nombreuses idées et alimenter son dynamisme et sa détermination, Pierre Laporte a investi. Au total, 730 000 euros en cinq ans mais avec une progression de chiffre d’affaires en conséquence puisqu’il est passé de 80 000 à 540 000 euros sur la même période.

« On est passé d’une petite ferme à une exploitation agricole », commente-t-il. Et les projets ne manquent pas. « Avec l’élargissement de la gamme de légumes d’hiver lié à nos nouvelles surfaces, des moyens de traction, un réseau d’irrigation sur toutes les parcelles et des équipements de conditionnement sont nécessaires. J’ai déjà acheté une laveuse de radis et une éplucheuse à poireaux, il faut maintenant le laveur de courges », plaisante Pierre Laporte. « Nous avons aussi besoin d’outils d’assistance à la récolte et surtout de progresser sur l’organisation du travail au niveau de chaque poste et de l’enchaînement des tâches dans la journée », conclut-il plein de motivation.

Comme une revendication d’une démarche qui va au-delà de produire local

« M’adapter aux besoins des différentes variétés »

 

 
Pierre Laporte s'est équipé de matériel spécifique aux contraintes de production de plusieurs variétés de fraise. © G. Dubon

Pierre Laporte est aussi un producteur sous serre spécialisé, puisque ses 5 000 m2 de multichapelles sont essentiellement réservés à la fraise hors-sol. « J’ai pris l’option d’une station de fertilisation facile à développer pour m’adapter aux besoins des différentes variétés, essentiellement Gariguette, Mara des bois et Charlotte », souligne le professionnel. Sa station dispose de différentes entrées et sorties, qu’il est possible de grouper avec plusieurs bacs de solution pour satisfaire les besoins différenciés par variétés. « Le bac de mélange amène un effet tampon et moins de risque qu’une injection directe », remarque-t-il.

Des supports de culture drainants

Le pilotage d’irrigation se fait par la mise en place d’un système de collecte du drainage. « Je contrôle le pH et l’Ec par un boîtier électronique m’autorisant 20 % de drainage », explique-t-il. Habitué à des supports drainants, Pierre Laporte cultive ses fraisiers sur un substrat écorce + tourbe. Le producteur a aussi mis une sonde hygrométrique afin de piloter l’aspersion sous gouttière pour réduire la pression estivale du thrips dans les chapelles de Mara des bois et Charlotte qui sont aussi enherbées à cet effet.

 

Témoigner d’une vérité sortie des champs

 

Pierre Laporte adhère aussi à l’association Parlons ferme qui fédère une nouvelle génération d’agriculteurs. © Ferme Dache dise

Outre les échanges avec toute son équipe, Pierre Laporte adhère aussi à l’association Parlons ferme. Une association qui fédère une nouvelle génération d’agriculteurs unis autour d’une volonté forte de communiquer sur leur métier. Son objectif est de « cultiver le dialogue entre les agriculteurs et les consommateurs français et témoigner d’une vérité sortie des champs », comme le définit Jennyfer Lussan, sa présidente et camarade de promo de Pierre.

Prendre sa place sur les réseaux sociaux

« J’ai la volonté d’être transparent sur mes pratiques et présenter une image positive de l’agriculture. En pratiquant la vente directe, je m’aperçois que les gens ne savent pas. Nos pratiques sont issues de contraintes qui lorsqu’elles sont expliquées sont acceptées », commente-t-il. Il faut se donner les moyens de communiquer et prendre place sur les réseaux sociaux. « L’agriculture responsable, consciente de son environnement qui se veut durable, doit aussi l’être de manière économique pour les personnes qui veulent en vivre », précise-t-il.

 

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