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Société civile agricole : le droit à l'essai

De trop nombreuses associations professionnelles échouent à cause de relations humaines difficiles qui rendent le travail en commun et les objectifs de l'exploitation impossibles

Grégory Nivelle président national de Gaec & Société, en compagnie de Daniel Couderc, membre du conseil d'administration de l'association, et de Marie-France Forest représentant la FDSEA 19, informent les acteurs de l'installation en Corrèze des dispositions du droit à l'essai.
Grégory Nivelle président national de Gaec & Société, en compagnie de Daniel Couderc, membre du conseil d'administration de l'association, et de Marie-France Forest représentant la FDSEA 19, informent les acteurs de l'installation en Corrèze des dispositions du droit à l'essai.
© UP19

Daniel Couderc, président de la FDSEA 19 a invité l'équipe de Gaec et Société à venir présenter ses activités, à Tulle à l'immeuble consulaire Puy Pinçon. Le président national Grégory Nivelle a tenu à faire le voyage pour rencontrer les corréziens, comme Victoria Timmerman, juriste de la structure venue apporter tous les éléments techniques qui s'imposaient. Gaec & Sociétés, association créée en 1951, dont la mission consiste à promouvoir et développer les sociétés agricoles. Pour cela, elle dispose de plusieurs moyens, comme la publication de documents techniques, de newsletters, la diffusion de l'actualité juridique et fiscale, et oeuvrant pour le développement agricole et en mettant en oeuvre l'accompagnement humain. Ce fut l'occasion de revenir sur les difficultés rencontrées lors des installations ou des mises en commun des moyens de production en Gaec.

Un constat largement commenté

Les participants à cette journée, professionnels de l'accompagnement à l'installation, juristes, et agriculteurs ont pu échanger sur le sujet. Ainsi Dominique Lanot, juriste du pôle Installation de la Chambre d'agriculture de la Corrèze débute les débats : « On a beaucoup de soucis avec les Gaec qui ne tiennent pas pour des raisons économiques, mais aussi humaines ». Françoise Curbelier ajoute : « Il faut plus de monde dans les formations, ça éviterait qu'autant de Gaec se dissolvent ». Et effectivement, les formations proposées lors de l'installation des jeunes agriculteurs ne font pas recettes. Pressés qu'ils sont de commencer l'exploitation de leur ferme, bien souvent ils omettent de bien préparer leur projet, et dans le cas de société, ne se posent pas les bonnes questions quant au relationnel et la bonne entente entre associés. Pierre Beysserie, vice-président de la Chambre plaide pour la formation : « En Gaec, on a un objectif, mais au fil du temps, les objectifs évoluent pour chaque associé. Les disponibilités, changent, on se marie, on a des enfants... Sans communiquer, le conflit est inévitable. La formation est importante pour pouvoir prévenir les conflits et les régler. On est capable de mettre 15 000EUR sur du matériel, mais investir 1000EUR pour une formation cruciale pour l'exploitation ce n'est pas possible. Pourquoi ? ». Et face au nombre conséquent de Gaec qui finissent par se séparer, Daniel Couderc propose : « On ne devient plus agriculteur pour 40 ans, c'est fini ce temps-là. Il faut aménager des systèmes d'entrée-sortie plus simples ». C'est pourquoi Grégory Nivelle est venu proposer le « droit à l'essai en société ».

S'associer : le droit à l'essai

Jusqu'alors, on parlait de « droit à l'essai en Gaec ». Grégory Nivelle nous corrige : « La réussite dépend surtout de l'accompagnement humain en général, donc c'est vrai pour les Gaec, mais c'est bon pour tout type de société. Il faut donc parler de 'droit à l'essai en société' ». Il ajoute : « Depuis 2005, la majorité des installations sont sous forme de sociétés, de plus, de nouveaux enjeux apparaissent dans les exploitations, comme la mise en place de stations photovoltaïques, donc les conflits dans la gestion des fermes sont plus fréquents ». Il s'agit d'un nouveau dispositif, encore en phase d'expérimentation pour permettre à 2 ou plus d'associés de se regrouper en société agricole pendant 1 an, le temps de constater le succès de l'entreprise ou non. Cette période est renouvelable un an de plus, avant de décider d'investir et de s'engager. En cas de non-association, les entrepreneurs reprennent le statut qu'ils avaient au départ, c'est-à-dire sans perte de droits, même si de l'aveu même de Victoria Timmerman, « tout n'est pas encore fixé de ce point de vue ». Le but étant que même si la société n'est pas possible, chacun puisse mettre fin à l'expérience sans ressentir un échec qui mettrait en difficulté les acteurs pour la suite de leur carrière.

Gaec & Sociétés mise principalement sur le fait que les associés ne se connaissent pas, et que fixer des objectifs n'est pas le seul gage de réussite de l'exploitation. C'est pourquoi l'accompagnement humain est fondamental pour éviter les conflits qui mènent à l'impasse. Le but avoué, c'est « de réduire le nombre de sorties d'associés à la suite de mésentente » comme le rappelle Victoria Timmerman. Les candidats à la société, s'ils veulent profiter du droit à l'essai et qu'ils soient dans un cadre familial ou non, doivent accepter un accompagnement humain leur permettant de définir clairement les objectifs, les moyens mis en oeuvre, et surtout de prévenir pendant l'essai, mais aussi après, les problèmes relationnels qui peuvent devenir bloquants pendant l'exploitation. Ainsi l'accompagnateur aide les associés à enregistrer l'essai auprès des DDT et CDO Gaec. Le contrat est établi, un échéancier est prévu et un statut est encore attendu pour garantir l'innocuité de l'essai afin que les personnes concernées puissent retrouver leur statut précédent. Quatre visites, d'une demi-journée chacune sont prévues sur toute la durée de l'essai, à chaque fois pour vérifier que l'échéancier est respecté, et pour faire le point sur la situation et les problématiques éventuelles rencontrées. Pour l'heure, seulement quelques départements se sont lancés dans l'expérimentation du dispositif, et si le ministre se dit intéressé, la décision de l'étendre sur tout le territoire n'est pas encore intervenue.

Grégory Nivelle insiste : « Si ce droit à l'essai est un dispositif essentiel pour assurer la réussite et la pérennité des exploitations, il ne faut pas qu'il devienne obligatoire. Je pense que la liberté doit être conservée avant tout ». Ainsi Gaec & Société ambitionne avec son projet, non de changer complètement la création de sociétés agricoles, mais d'apporter un outil supplémentaire, précieux, pour que l'entreprise ne soit plus un pari comprenant de nombreuses inconnues, mais une aventure entre personnes qui peuvent s'entendre à condition de pouvoir communiquer entre eux. Et communiquer cela demande de l'écoute et de la médiation, et c'est toute la valeur ajoutée que propose Grégory Nivelle.

Véronique Legras

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