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New Holland T8 contre T8 SmartTrax : Duel serré entre roues et chenilles

Nous avons confronté au champ, dans les mêmes conditions, deux tracteurs de 435 chevaux, l’un doté de pneus arrière, l’autre d’un train de chenilles. Voici le compte rendu de ces essais.

Il y a près de deux ans, à l’occasion du Sima 2015, New Holland présentait la gamme T8 SmartTrax, en même temps que la génération Tier 4 final des T8. Dotés de chenilles à la place des roues arrière, les T8 SmartTrax se déclinent en trois modèles de puissances égales aux trois T8 à roues les plus puissants de la gamme. Hybrides entre un chenillard à deux longs trains de chenilles et un tracteur à roues, ces engins se déclinent uniquement en transmission à variation continue AutoCommand.

Triangulaires, les deux chenilles se composent d’une grande roue d’entraînement en position centrale haute, de trois barbotins en position centrale basse, et de deux roues tendeuses légèrement surélevées par rapport aux barbotins. Cette construction limite la surface de contact sur la route, donc l’usure, à la bande de roulement sous les trois barbotins et l’augmente au champ : un léger enfoncement du train de chenilles accroît la longueur de portance à la distance entre les deux roues tendeuses, soit 1,80 m. La surface de contact du train arrière monte alors à 2,7 m2, ce qui "équivaut à un jumelage de pneus Axiobib comme ceux du tracteur à roues testé ici (NDLR : Michelin AxioBib 900/60R42 de 2,15 m de diamètre), affirme Nicolas Morel, chef produit tracteurs New Holland, tout en gardant un gabarit de 3 mètres de large, contre environ 5 mètres en jumelage de pneus de 900 mm."

Hybride entre les chenillards classiques et les tracteurs à roues

Le tractoriste positionne le T8 SmartTrax dans une nouvelle catégorie, hybride entre les tracteurs standard à roues et les chenillards (John Deere 8RT et 9 RT, Challenger MT700 et MT800). Comparés aux modèles à roues, le T8 SmartTrax offre une grande surface de contact, donc une meilleure traction et une compaction moindre, tout en restant dans un gabarit maîtrisé. Face aux chenillards, dont la longueur de la bande de roulement varie de 2,50 à 3 m, il se distingue par la possibilité de bloquer le différentiel, par le ripage limité réduisant les dégâts en fourrière, ainsi que par une conduite qui ne dépayse pas par rapport à un tracteur standard.

Plus lourd par nature

Dotées d’un point de pivot situé sous la roue d’entraînement, les chenilles permettent un bon suivi du sol. Leur châssis en fonte alourdit naturellement le tracteur d’environ trois tonnes. Le T8.435 SmartTrax à l’essai dépasse les 19 t sur la bascule avec une masse frontale de 1,4 t quand le T8.435 à roues, lesté de 2,5 t de masses de roue à l’arrière dépasse à peine les 17,5 t, lesté de la même masse frontale. Le T8 à chenilles dépasse donc les 45 kg/ch nécessaires à la traction lourde (contre 42 kg/ch pour le T8 à roues), tout en proposant une charge au sol annoncée à seulement 450 g/cm2.

Le jeu des sept différences

Entre les deux tracteurs à l’essai peu de différences. On en dénombre cependant sept : le train roulant, les entretoises, les garde-boue, le réservoir, le poids, le marchepied et le support de cabine. Proposées en 600 ou 750 mm de large, les chenilles sont reliées au châssis central du pont arrière par deux entretoises, dont la dimension est à définir à la commande en fonction de la voie souhaitée (de 1,95 à 3 m, par pas de 20 cm). Les garde-boue ont été redessinés pour épouser la forme triangulaire des chenilles. Il en a été de même pour le réservoir à carburant pour conserver une autonomie comparable aux modèles à roues, ainsi que pour les supports de cabine et pour le marchepied. C’est ce dernier qui est incriminé dans le dépassement du gabarit routier (2,55 m) et qui fait que ce tracteur est homologué Maga (machine agricole) et limité à 25 km/h. "De plus, au-delà de cette vitesse, les galets de barbotin chauffent et usent prématurément", confie Nicolas Morel. Tout le reste du tracteur est identique. Dernière différence : le prix. Le T8.435 est annoncé à 303 442 euros HT, contre 373 995 pour la version SmartTrax.

 

Impressions de conduite : vibrations contre roulis

Sur route, le T8 SmartTrax n’est pas à son avantage. Avec l’absorption des pneumatiques en moins, les vibrations se font davantage ressentir en cabine (même en étant limité par sa vitesse maximale de 25 km/h), ceci malgré le pont avant et la cabine suspendus. Lorsque l’on tourne, les chenilles ont tendance à emmener le tracteur et ripent générant des petits à-coups latéraux. La différence se fait aussi légèrement ressentir au niveau du bruit.

Au champ, les impressions de ripage sont moins présentes, surtout sur sol travaillé. La chenille se démarque positivement par une impression de stabilité, de sécurité, qui doit s’apprécier notamment en dévers. Gonflés entre 0,8 à 1 bar, les pneus Axiobib génèrent plus de roulis, mais aussi du tangage. La longueur de la bande de roulement des chenilles montées sur pivot absorbe mieux les irrégularités du terrain. Lorsque la vitesse augmente, les secousses sont plus marquées qu’avec les pneus.

 

Traction au déchaumage : égalité en conditions sèches

Disposant des mêmes lestages avant, des pneumatiques avant identiques gonflés à la même pression, les deux tracteurs ont été attelés à un déchaumeur Kuhn Cultimer L 6000 doté de 19 dents travaillant une bande de 5,85 m. Chaque dent est dotée de pointes et de versoirs de 80 mm de largeur. Ces pointes sont renforcées au carbure et demandent un peu plus de capacité de traction que des pointes classiques.

Pour comparer le plus justement possible la traction des deux tracteurs, la hauteur des bras de relevage est contrôlée pour qu’elle soit identique, à 55 cm du sol.

Les deux tracteurs étant équipés de l’autoguidage par GPS, cette fonction est utilisée pour tracer, à l’aide du déchaumeur, une ligne de départ et une ligne d’arrivée dans une parcelle à plus de 15 % d’argile non déchaumée derrière un blé : chaque bande mesure 250 m. Cette parcelle est marquée par une pente légère de 2,5 %. Les passages de pulvérisateur sont soigneusement évités pour ne pas biaiser les mesures. Pour gommer au maximum le biais dû à l’hétérogénéité de la parcelle, le système de guidage des tracteurs est utilisé, de façon à ce que les deux tests soient juxtaposés sans empiéter l’un sur l’autre.

Avant chaque test, le tracteur est "chauffé" en déchaumant dans une parcelle voisine pendant une vingtaine de minutes.

Quatre essais de profondeur sont réalisés à 15, 25, 32 et 38 cm. À chaque essai, les indications de vitesse (théorique) et de taux de patinage sont relevées sur le terminal Intelliview IV des tracteurs, tandis que l’on chronomètre le temps mis pour réaliser les 250 m en montée, puis en descente, en partant toujours à l’arrêt, déchaumeur posé au sol. L’ensemble des mesures moyennes est compilé dans le TABLEAU 1.

Il ressort que pour tous les essais de traction jusqu’à 32 cm, la vitesse théorique annoncée par le tracteur à roues est plus élevée que celle du tracteur à chenilles. À l’inverse, le taux de patinage est logiquement avantageux pour le tracteur à chenilles : ces deux facteurs expliquent les chronos très proches (différence non significative) entre les deux types de véhicules.

En revanche, la différence est très marquée lorsque l’on durcit à l’extrême les conditions en piochant à 38 cm. La capacité de transmission de la puissance au sol atteint ses limites sur le tracteur à roues, contrairement au SmartTrax : c’est effet la sécurité des dents de l’outil qui est mis à défaut avec le modèle à chenilles. Rappelons que le Cultimer dispose de 600 kg à la pointe avec la sécurité à double ressort. Les pointes de 80 mm de large ne sont donc pas prévues en conditions normales pour travailler en dessous de 25-30 cm et doivent être remplacées par des versions de 50 mm pour un travail de fissuration plus profond.

Si les chenilles constituent un avantage indéniable en termes de patinage et de rendement de traction, leur poids — pour rappel 1,5 t sépare les deux tracteurs dans les configurations de l’essai — peut se montrer être un handicap dans certaines situations. "Ce n’est pas dans ces conditions très sèches que les chenilles se démarquent le plus, analyse Nicolas Morel. S’il vient une pluie pénétrante, le SmartTrax se distinguera davantage. Au contraire, une pluie superficielle met en avant le tracteur à pneus. Enfin, en conditions très humides et peu portantes, le SmartTrax sortira du lot haut la main, en continuant à travailler là où le pneu ne pourra plus."

Néanmoins, dans des conditions sèches comme celles de l’essai, le SmartTrax aurait pu tirer son épingle du jeu en travail du sol profond derrière un déchaumage superficiel : il nous manquait des ailettes sur les dents pour réaliser le premier déchaumage (en superficie) et mener à bien ce test.

 

Tractor force : avantage pour la chenille

Pour exprimer au maximum les différences en termes de traction, nous avons réalisé des tests avec une remorque de traction, à l’image de celles utilisées en concours de tracteur pulling. Cette remorque se compose d’un large sabot qui traîne au sol sur lequel est posé un premier lestage. Derrière ce plateau, un deuxième lestage est disposé sur une plateforme mobile, au-dessus de l’essieu. Cette remorque est attelée via une chaîne à la barre de traction. Au fur et à mesure que le tracteur avance, l’essieu de la remorque entraîne, via un cardan, un treuil qui translate au fur et à mesure la charge mobile vers l’avant. Ce transfert de poids sur le plateau traîné rend la remorque de plus en plus difficile à tracter. L’essai s’arrête lorsque le tracteur n’avance plus ou lorsqu’il dépasse les 100 m parcourus, la charge étant alors totalement transférée sur l’avant et l’essieu de la remorque étant alors freiné.

Après quelques tests de charge avec le tracteur à roues, ce sont 1,6 t de lestage sur l’avant et 4,8 t sur la plateforme mobile qui sont installés. Ces tests offrent l’occasion de stabiliser la "piste" improvisée dans une parcelle derrière un blé déchaumé en surface. Les résultats sont compilés dans le TABLEAU 2.

Pour limiter l’effet d’inertie, la vitesse cible est limitée : le chauffeur se positionne pour tendre la chaîne reliant le tracteur à la remorque, marque l’arrêt puis met les gaz pour atteindre la vitesse cible.

L’effet d’inertie est mis en évidence avec le tracteur à roues. En effet, à 10 km/h, celui-ci parvient à traîner la remorque sur 89 m, contre 74,40 m en limitant la vitesse maximale à 5 km/h. C’est cette vitesse-là qui sera retenue pour la suite des essais. Malgré cela, le T8.435 SmartTrax emmène la remorque jusqu’en bout de piste sans être stoppé : il faudra soit désactiver le pont avant, soit ajouter une tonne supplémentaire sur l’avant de la remorque pour atteindre les limites de traction des chenilles.

Au final, dans cet exercice de traction extrême, le match est remporté haut la main par le tracteur à chenilles, avec des différences très significatives.

 

Les chenilles pénalisent le braquage

Même si dans cette catégorie de puissance, les largeurs d’outils tractés ne nécessitent pas souvent d’avoir un rayon de braquage court, nous avons souhaité comparer ce dernier. Lors de la préparation des tracteurs, les butées de roue sont réglées exactement de la même façon à 65 mm. Pour le mesurer, le conducteur maintient le volant en butée en décrivant un tour complet, les roues avant marquant le sol fraîchement déchaumé. Compilées dans le tableau 3, les mesures sont réalisées pont avant enclenché, puis désactivé.

Comme attendu, sur le tracteur à roues, l’enclenchement du pont avant dégrade le rayon de braquage de près de 60 cm. Également suspecté, le rayon de braquage est plus important sur le tracteur à chenilles, la longueur de la bande de roulement et la surface de contact ayant naturellement tendance à emmener le tracteur dans l’axe. Cette différence dépasse même le mètre pont avant désactivé. Mais contrairement au tracteur à roues, l’activation du pont avant favorise le braquage en "tirant" l’avant du tracteur.

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