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L’électricité, moteur de la traction

La traction est certainement la fonction la plus difficile à électriser sur une exploitation, tant elle peut être exigeante en termes de puissance et d’autonomie. Pourtant, les nouvelles technologies permettent aujourd’hui d’y parvenir.

Il y a dix ans, le concessionnaire marnais Kremer Viticole dévoilait au Viteff son premier tracteur enjambeur électrique trois roues, le T3E. Si ce prototype faisait sourire à l’époque les plus sceptiques, Kremer a su convaincre ses premiers clients et faire mûrir la technologie. Le T4E (quatre roues) est lancé en 2012. Cette même année, Tecnoma présente le premier prototype de tracteur enjambeur électrique : le Voltis. L’année qui suit, est créé Kremer Énergie, pour industrialiser la fabrication du T4E. Kremer Énergie sera racheté trois ans plus tard par Bobard. En l’espace d’une demi-décennie, l’enjambeur électrique s’est forgé une place et une crédibilité. Depuis, d’autres constructeurs comme Saudel ou Sabi Agri proposent des tracteurs enjambeurs de 25 à 50 chevaux, destinés essentiellement à du travail du sol. Plusieurs explications viennent asseoir cette rapide évolution. Le premier concerne l’usage de l’hydraulique pour se mouvoir. L’hydrostatique n’offre pas un bon rendement de transmission. Qui plus est, les coûts d’entretien des enjambeurs hydrostatiques se montrent importants. Et la tendance au retour du travail du sol fait grimper le nombre d’heures que l’on fait faire à ces engins.

L’enjambeur électrique est arrivé dans un contexte où de nouvelles générations de batteries offraient un bon compromis entre le poids et le volume d’un côté et l’autonomie de l’autre. Cette dernière ne fait qu’accroître d’année en année. Ce tracteur est apprécié pour sa simplicité – peu de pièces en mouvement – son silence et son faible coût à l’usage. S’il faut compter un surcoût de l’ordre de 30 % à l’achat d’un T4E, comparativement à son équivalent à motorisation thermique (140-150 ch), le retour sur investissement est rapide. Kremer Énergie annonce 6 euros d’électricité pour 8 heures de fonctionnement, contre 100 euros de GNR pour un plein de 100 litres, ainsi qu’une réduction par cinq des frais d’entretien.

Si les plus sceptiques des premiers jours doutaient des performances des moteurs électriques, encore faut-il rappeler que les 780 tonnes des doubles rames de TGV Duplex sont mues par des moteurs électriques à plus de 300 km/h. Au contraire, outre le très bon rendement, le moteur électrique propose un bon couple et une nervosité que l’on ne retrouve pas en hydrostatique.

Autre atout, cette fois-ci marketing, le tracteur électrique participe aussi à la neutralité carbone dans le bilan global d’une exploitation et dans sa politique de communication auprès des consommateurs.

Tracteurs standards et interlignes aussi concernés

Les constructeurs de tracteurs enjambeurs ne sont pas les seuls à s’intéresser à l’énergie électrique. Les constructeurs de tracteurs de grandes cultures et interlignes s’intéressent à l’énergie électrique à plusieurs niveaux. John Deere vient de dévoiler sa future transmission à variation continue électromécanique eAutoPowr sur les gammes 8R, qui remplace la partie hydraulique de la variation du rapport de transmission par des moteurs électriques. Cela permet de gagner en rendement de transmission et une part de l’énergie qui pouvait être perdue à entraîner partiellement une pompe hydraulique est désormais disponible pour entraîner électriquement des éléments extérieurs aux tracteurs, comme un pont moteur de remorque.

Globalement, les grands acteurs du marché du tracteur travaillent tous de leur côté pour exploiter l’électricité pour animer des équipements jusqu’ici entraînés par les distributeurs hydrauliques. Cela devrait aboutir à terme à une norme décrivant la technologie à adopter pour qu’elle soit utilisable par tous.

Dans les tracteurs spécialisés, Carraro a présenté le concept de tracteur "Ibrido", qui comme les voitures hybrides peut combiner ou alterner moteur thermique compact et moteur électrique alimenté par des batteries. Comme sur les voitures hybrides et les tracteurs enjambeurs électriques, il est possible de recharger les batteries en exploitant l’énergie cinétique liée à la pente (en descente) ou à la vitesse.

Des tracteurs plus ou moins proches des modèles thermiques

Le tout-électrique est également à l’étude dans les centres de recherche et développement des constructeurs de tracteurs interlignes et de grandes cultures. En 2017, Fendt présentait l’e100 Vario un prototype de tracteur spécialisé, d’une puissance d’entraînement de 50 kW, soit l’équivalent de 68 chevaux. Hormis son look, la seule différence avec un tracteur spécialisé thermique réside dans son bloc-moteur diesel (et tous ses périphériques), qui a été remplacé par un pack de batteries lithium-ion alimentant un moteur électrique entraînant la transmission à variation continue hydromécanique, la prise de force et le circuit hydraulique. "Il affiche aujourd’hui une autonomie de 5 heures de travail et sa batterie se recharge à 80 % en 40 minutes, explique Oliver Leroy, responsable marketing opérationnel Fendt. Il tourne dans quelques exploitations viticoles en Allemagne et à l'entretien de la ville de Munich. Son lancement commercial n’est pas prévu avant 2021."

Avec son concept Sesam présenté en 2017, John Deere pousse plus le concept, cette fois-ci sur un tracteur de grandes cultures de 180 chevaux. Le prototype présenté au Sima abrite une tonne de batterie à la place du moteur et deux moteurs électriques, l’un pour la traction, l’autre pour les besoins hydrauliques et la prise de force, les deux moteurs pouvant travailler conjointement au besoin pour l’un ou l’autre des besoins. Toujours à l’étude, le concept proposait il y a deux ans une autonomie de quatre heures, soit le double de ce que ce même prototype disposait un an auparavant.

Il y a tout juste deux ans, la fédération des vignerons indépendants du Gard, en collaboration avec l’école des Mines d’Alès, l’IUT de Nîmes et l’université de Montpellier dévoilait au Sitevi son prototype de tracteur tout électrique. "Le prototype n’a pas évolué, explique Barbara Martin, directrice de la fédération des vignerons indépendants du Gard. Le tracteur continue de travailler sur le domaine de Valescure à Aimargues. Nous sommes à la recherche de partenaires pour poursuivre le projet." Un consultant en photovoltaïque s’est montré très intéressé par le projet, dans un objectif de rendre une exploitation autonome en énergie.

Les robots des vignes majoritairement entraînés électriquement

Les robots. Ces nouveaux engins des vignes ont fait le choix de la motorisation électrique pour la grande majorité d’entre eux. Connu pour ses robots enjambeurs électriques Bakus, Vitibot a commencé par développer ses premiers engins sur la base de chenillard à motorisation thermique. PDG de Vitibot, Cédric Bache nous explique les raisons de ces changements en termes d’énergie. "Le premier inconvénient du thermique, c’est le bruit. Le robot peut être appelé à tourner jour et nuit. Il ne s’agit pas de créer des problèmes de voisinage. À cela s’ajoutent plusieurs freins à l’usage de l’hydrostatique. Cela demande beaucoup d’entretien. Avec l’électrique, il y a très peu d’entretien, pas de produits polluants comme le glycol à manipuler. La troisième raison concerne la régularité de l’énergie électrique. En hydraulique, selon que l’huile est chaude ou froide, le comportement sera complètement différent."

 

Découvrez nos deux témoignages : 

Hugo Drappier : https://www.reussir.fr/machinisme/hugo-drappier-un-enjambeur-electrique-en-autoconsommation

Joffrey Collemiche : https://www.reussir.fr/machinisme/joffrey-collemiche-wm-presta-conduire-un-tracteur-electrique-est-relaxant

 

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