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Fertilisation : Épandre le lisier à la dose près

L’épandage de lisier gagne en précision avec l’arrivée d’un capteur embarqué d’analyse du lisier ouvrant la voie à la modulation de dose.

Après avoir intégré les systèmes DPA améliorant la répartition longitudinale et des équipements d’épandages (rampes à pendillards et enfouisseurs) garantissant la répartition transversale, les tonnes à lisier semblent armées pour offrir un épandage régulier et précis. Subsiste toutefois un biais majeur dans ce niveau de précision : la connaissance de la valeur fertilisante du lisier. Les analyses réalisées sur différents types de lisier confirment l’hétérogénéité de leur teneur en éléments fertilisants, selon que le lisier est prélevé en début, milieu ou fin de fosse, et selon le niveau de brassage. « On observe des différences de 1 à 5 », annonce Julie Brun chez Samson. « Sur des lisiers de porc, la teneur en azote peut varier de 2 à 7 unités », complète Aurélien Nucéra chez Pichon. C’est à partir de ce constat que John Deere a développé son capteur d’analyse du lisier (Manure Sensor) en réutilisant la technologie proche infrarouge de son capteur de matière sèche (et fibres ADF, NDF, protéine, amidon) HarvestLab embarqué sur ses ensileuses.

Un capteur infrarouge mesurant les fertilisants

Le capteur est installé au niveau de la vidange de la tonne à lisier, permettant une analyse en temps réel (4 000 fois par seconde) des principaux composants : azote total (N), phosphore (P), potassium (K), azote ammoniacal (NH4) et matière sèche. Le capteur est relié à un boîtier de calcul, lui-même connecté au boîtier de gestion de la tonne à lisier et à une console John Deere GSD 2630 en cabine. Le système compile ainsi les informations du débitmètre et du capteur NIR pour calculer la vitesse cible à adopter en fonction de la dose désirée. Le paramétrage de la dose tient compte de deux critères : une valeur cible pour un premier élément et une valeur limite pour un second. « On peut choisir une dose cible de 90 unités d’azote et une dose limite de 50 unités de phosphore. Le Manure Sensor va réguler la vitesse de manière à respecter la dose d’azote, sauf lorsque le phosphore atteint la valeur seuil », illustre François Helfter chez John Deere. Dans la pratique, la consigne de vitesse s’affiche sur l’écran de la console et le chauffeur régule la vitesse du tracteur en conséquence.

La dose régulée par la vitesse du tracteur

Dans un deuxième temps, si le tracteur n’est pas capable d’atteindre la vitesse cible, le système peut agir sur le débit de la tonne à lisier (avec certains modèles). « Le fonctionnement optimal est obtenu en agissant uniquement sur la vitesse, afin de conserver un débit constant, le mieux adapté à l’équipement de la tonne à lisier », estime le spécialiste.

Avantage réservé pour l’instant à certains tracteurs John Deere équipés d’une transmission à variation continue ou d’un powershift de nouvelle génération (e23), le système peut piloter automatiquement la vitesse du tracteur, améliorant la réactivité de la régulation et le confort du chauffeur.

À partir du moment où l’électronique de la tonne à lisier est en mesure de dialoguer avec le dispositif John Deere, cette technologie pourra s’adapter à toutes les marques de tonnes, mais aussi sur les dispositifs d’épandage sans tonne. En attendant, durant la phase de mise au point et d’étalonnage du système, John Deere a établi des partenariats avec certains constructeurs (Joskin, Samson, Fliegl, Garant…).

Des tests en France cette année

John Deere s’est récemment rapproché de Pichon et de Mauguin pour réaliser cette année des tests en France, notamment sur le lisier de bovin et le digestat issu d’unités de méthanisation, pour lesquels John Deere manque encore de références. « Les tests ont principalement été réalisés en Allemagne et en Hollande. Il nous faut désormais valider le fonctionnement de notre système avec deux acteurs majeurs du marché français », justifie François Helfter.

En connaissant la dose épandue avec précision, le système Manure Sensor permet d’établir des cartes d’application utiles à la traçabilité des épandages. Il ouvre également de nouvelles perspectives en termes de modulation des apports et de stratégie de fertilisation. « En connaissant parfaitement les doses de fertilisants organiques apportées, il est plus facilement envisageable de réduire les doses d’engrais minéral. »

Des arguments agronomiques et logistiques

L’analyse du lisier peut aussi avoir un avantage en termes logistiques. « Nous prévoyons de monter un capteur sur une tonne à lisier Flow Master dont la pompe centrifuge assure à la fois le remplissage et la vidange. Nous pourrons ainsi estimer la quantité de fertilisant dans une tonne à lisier avant de l’envoyer sur un chantier. Cela peut être un argument déterminant dans l’approvisionnement des chantiers éloignés pour lesquels on choisira le lisier le plus riche », prévoit Aurélien Nucéra. Toutes ces perspectives prometteuses devraient séduire les ETA et les Cuma, à condition de réussir à justifier un surcoût de prestation pour rentabiliser un investissement de plus de 20 000 euros. La rentabilité sera d’autant plus aisée pour un utilisateur qui valorisera le capteur sur son ensileuse et sa tonne à lisier, voire à poste fixe pour des analyses d’échantillon.

La coupure de tronçons pour les grandes largeurs

Les tonnes à lisier équipées de rampes à pendillards adoptent désormais des dispositifs de coupure de tronçons, notamment en grandes largeurs comme le confirme Aurélien Nucéra de chez Pichon : « nos rampes de 24 à 30 mètres en sont équipées de série ». Si les constructeurs sont capables d’offrir des tronçons de 50 centimètres, sur le terrain, les utilisateurs optent généralement pour des sections de 1,50 à 3 mètres, des largeurs suffisantes pour limiter efficacement les manques et les recouvrements. La coupure de tronçon est encore majoritairement utilisée de façon manuelle. Pourtant, plusieurs constructeurs proposent des systèmes de coupure automatique en lien avec un système de guidage GPS. « La coupure par GPS est sensible au paramétrage, car le temps de latence nécessaire entre la coupure et la vidange complète des tuyaux est dépendant du type de lisier et de la longueur des tuyaux, note Julien Brun. Pour être précis, il faudrait disposer d’un système de coupure au plus près de la sortie des pendillards. Or, la plupart des dispositifs sont intégrés à proximité du broyeur répartiteur, afin d’éviter les phénomènes de bouchage. »

Pilotage centralisé sur écran tactile

La multiplication des fonctions hydrauliques et des réglages affinés par l’électronique amène les constructeurs de tonnes à lisier à proposer des terminaux à grand écran tactile. Ces derniers s’accompagnent le plus souvent d’un petit boîtier de commande ou d’un joystick facilitant la mise en œuvre des fonctions hydrauliques. Plusieurs marques proposent des configurations et des automatismes prédéfinis selon trois modes : remplissage, transport et vidange. Si certains ont clairement fait le choix de l’Isobus, d’autres hésitent à passer le cap arguant que la complexité des commandes d’une tonne à lisier est difficilement compatible avec l’utilisation du terminal Isobus du tracteur.

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