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La production de colza se développe en Amérique du Sud

Industriels et semenciers sont dans leurs starting-blocks pour promouvoir la culture du colza en Argentine et en Uruguay dans le sillage des biocarburants aéronautiques.

 

Vraquier sur le fleuve du Paraná à hauteur de la ville de Rosario.
Vraquier sur le fleuve du Paraná à hauteur de la ville de Rosario.
© Marc-Henry André

La culture du colza mobilise moins de 300 000 hectares dans toute l’Amérique du Sud, soit 0,7 % des 38 millions d’hectares cultivés en colza dans le monde, renseigne le chercheur Cristián Appella, de l’institut national de technologie agricole argentin (INTA). Mais cela pourrait vite changer.

Une culture tirée par le biodiesel en Uruguay

« En Argentine, on en cultive seulement 33 000 hectares pour une production de 45 000 tonnes, tandis que l’Uruguay fait figure de pionnier de fraîche date avec 125 00 hectares semés en 2024-2025.

En Uruguay, cette surface de colza devrait doubler en 2025-2026 pour atteindre 250 000 hectares, de source officielle. La raison de ce bond de géant attendu est le rôle joué, côté demande, par la société Alcools de l’Uruguay, qui produit du biodiesel.

Au Brésil aussi, la filière du colza a encore tout à faire avec une sole qui a culminé à 92 000 hectares pour une production de 135 000 tonnes lors de la saison 2023-2024, selon l’institut de statistiques brésilien (Conab).

La production de colza en Argentine pourrait atteindre 1,5 million de tonnes d’ici à dix ans.

Mais c’est en Argentine que le colza est attendu au tournant. En effet, selon l’analyste Gustavo López, ex-Cargill et directeur du cabinet Agritrend, « la production de colza en Argentine pourrait atteindre 1,5 million de tonnes d’ici à dix ans ». Cependant, l'analyste tempère : « l’histoire toujours avortée du colza en Argentine est un peu celle de l’œuf ou de la poule. Qui fait défaut, l’offre ou la demande ? Les Bunge, Cargill et Louis Dreyfus se montrent intéressés. Mais les volumes ne sont pas au rendez-vous. Notre récolte de colza de quelques dizaines de milliers de tonnes pourrait être triturée en une demi-journée au vu de la capacité de trituration du parc industriel argentin, qui est de 180 000 tonnes par jour ! »

Tout dépendrait de la volonté des industriels de donner son impulsion à la filière. Or, en mai 2024, la chambre argentine des industriels de grains oléagineux (Ciara) et l’Inta-Paraná (son antenne dans la province d’Entre Ríos, voisine de l’Uruguay, où le colza a le vent en poupe comme nulle part ailleurs en Argentine) ont signé un accord de partenariat afin de promouvoir les efforts de sélection génétique des cultures bioénergétiques : le colza, mais également la carinata et la cameline.

Lire aussi : Biocarburant : la cameline, une ressource attendue

Un marché en manque de débouchés en Argentine

« Plusieurs facteurs explique la quasi absence du colza dans la campagne argentine », contextualise le chercheur Cristián Appella. Le manque de débouchés autre que celui, encore chiche, des biocarburants, en est un. En effet, le marché argentin des huiles pour la consommation humaine est dominé par l’huile de tournesol bon marché. Ensuite, il y a un désintérêt et une méconnaissance agronomique de cette culture très répandues parmi les producteurs de grains du pays. Enfin, « il subsiste des lacunes technologiques au niveau de la récolte et du stockage, toujours délicate avec des grains de si petite taille », dit-il.

La combinaison "colza + soja" offre une marge brute espérée plus élevée que l’option "blé + soja".

Le colza a cependant de gros atouts à faire valoir auprès des cultivateurs sud-américains. « Cette culture d’hiver libère la parcelle de vingt à trente jours plus tôt qu’un blé, ce qui permet de faire un soja en dérobée sur un cycle plus long. Par rapport à l’option "blé + soja", très courante en Argentine, la combinaison "colza + soja" offre une marge brute espérée plus élevée », précise-t-il.

Et puis, le colza ne concurrence pas les cultures oléagineuses d’été (soja et tournesol) au niveau de la disponibilité des terres.

Une production de colza sous contrat en Uruguay.

L’analyste argentin Guillermo García, ex-Bunge, indique que : « La nouvelle percée du colza dans la région est dû à l’engouement autour du biocarburants aéronautiques. En Uruguay, la culture se fait sous contrat avec un exportateur qui fournit les semences, un contrat dont les prix liés à un cahier des charges qualité sont indexés à ceux d’Euronext », renseigne-t-il.

Le président Cône Sud du groupe Corteva, l’Argentin Juan Lariguet, nous a raconté, en marge du sommet Jonagro, tenu à Buenos Aires le 13 mai, que Corteva, « leader du marché des graines de colza aux États-Unis et qui a noué un partenariat avec Bunge et Chevron pour y produire du SAF, rappelle-t-il, va lancer sur le marché uruguayen, dès cette année, ses semences de colza d’hiver, et en Argentine à partir de 2027, renseigne-t-il à La Dépêche-LPM.

Lire aussi : L’Argentine exporte ses blés vers le Brésil et l’Asie, en l'absence du Maghreb

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