Commerce international : la ferme Argentine sans taxe à l’export aura vécu 72 heures
Le gouvernement argentin a mis fin au régime fiscal exceptionnel prévu pour le secteur agro-exportateur après que celui-ci a a acquis 19,5 millions de tonnes de grains en temps record.
Le gouvernement argentin a mis fin au régime fiscal exceptionnel prévu pour le secteur agro-exportateur après que celui-ci a a acquis 19,5 millions de tonnes de grains en temps record.

Soixante-douze heures après l’annonce surprise, dimanche dernier, de l’élimination totale des taxes à l’export (26% sur le soja ; 9% sur le maïs grain ; 9,5% sur le blé, entre autres), qui devait perdurer jusqu’au 31 octobre prochain (un fait inédit en vingt-cinq ans), le gouvernement argentin a annoncé la fin de cette mesure exceptionnelle dès le mercredi 25 septembre.
Cette stratégie de politique monétaire a eu le succès escompté : les céréaliers argentins se sont rués sur l’occasion.
La mesure a provoqué une hausse immédiate de 50 dollars la tonne en moyenne du cours local de la tonne de fèves de soja, aussi bien sur le marché physique que sur ceux à terme. Ils sont parvenus dès lundi dernier à 370 dollars la tonne sur le marché physique et autour de 325 dollars la tonne pour les positions soja mai 2026. Mais ces cours se sont vite repliés à un niveau intermédiaire avant même l’annonce de la fin de la mesure.
« L’avantage financier est trop important pour passer à côté », nous avait prédit le jeune président de CARBAP, qui représente les céréaliers des provinces de Buenos Aires et de La Pampa, Ignacio Kovarsky, en exclusivité, lundi dernier, au siège de CARBAP à Buenos Aires.
Ventes de près de 20 Mt de grains en deux jours
Les céréaliers de l’Argentine ont ainsi vendu 19,5 millions de tonnes (Mt) de grains destinés à l’export en l’espace de deux jours, dont 5,12 Mt de soja, plus celles correspondant à des embarquements prévus de 7,14 Mt de tourteaux de soja et 1,52 Mt d’huile de soja ; 3,1 Mt de blé ; et 2 Mt de maïs ; ceci pour une valeur totale de 7,012 milliards de dollars, soit le plafond financier fixé d’avance par le décret.
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Le seul but de la mesure a été d’accélérer les déclarations de ventes à l’export pour générer un flux massif de rentrées de devises étrangères dans le système monétaire argentin afin d’en assurer l’équilibre, priorité absolue de l’équipe du président Javier Milei.
Cette éphémère parenthèse dorée au profit des fermiers a occasionné une déferlante de soja d’origine argentine sur le marché mondial. L’effet baissier sur les cours mondiaux aurait été de court terme, encaissé dès lundi dernier avec une baisse attribuée en partie à ce facteur de 3% des cours à la Bourse de Chicago, selon Pablo Ginestet, du syndicat CARBAP1.
Par ailleurs, les exportateurs ayant acquis des grains dans ce cadre exceptionnel pourront les embarquer durant les 365 prochains jours. « Ce détail constitue une grosse différence par rapport aux précédents programmes fiscaux de court terme pour l’exportation de grains auxquels s’était habituée la filière ces dernières années », rappelle Pablo Ginestet « La mesure a aussi eu un effet sur le nombre d’opérations pactées bien au-delà du 31 octobre », assure M. Ginestet ».
Ainsi, le secteur agricole argentin a été utilisé comme un instrument de politique monétaire. La nouveauté est qu’est que ce décret, si éphémère fût-il, a pour une fois été à l’avantage des exportateurs et des céréaliers. Il avait été précédé d’un rabais important de ces taxes annoncé il y a deux mois.
Le gouvernement de Javier Milei, ultra-libéral assumé, est le premier à vouloir la disparition définitive de ces taxes.
Mais les faits ont prouvé la dépendance du fisc argentin à leur égard. « La loi du budget 2026 compte sur une hausse de 22,6% de ce prélèvement fiscal spécifique », précise Ignacio Kovarsky.
[1] Confédération des associations rurales de Buenos Aires et de La Pampa. Il s’agit du principal syndicat d’agriculteurs de la région.