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Pour contrer les attaques de l'oïdium
Bien positionner le premier traitement

Traiter plus tôt, alterner les familles chimiques de fongicides : telles sont les deux grandes leçons à retenir d’une année 2012 au cours de laquelle l’oïdium s’est montré particulièrement virulent.

Fructifications de l'oïdium. “ En 2012,on a procédé à des traitements 
de vengeance, allant alors jusqu’à 10 ou 11 traitements, inutiles sur oïdium sporulé ”, affirme Bernard Molot.
Fructifications de l'oïdium. “ En 2012,on a procédé à des traitements
de vengeance, allant alors jusqu’à 10 ou 11 traitements, inutiles sur oïdium sporulé ”, affirme Bernard Molot.
© Hervé Steva/Inra

L’année 2012 restera dans la mémoire des vignerons comme celle de tous les dangers tant l’oïdium aura su se montrer virulent et en a sans doute surpris plus d’un. Il faut dire que toutes les conditions étaient réunies pour favoriser son développement. La météorologie, en particulier, s’est montrée vis-à-vis de ce champignon, très clémente. “ Les cleistothèces, forme sous laquelle l’oïdium hiverne, ont des préférences climatiques ”, explique Bernard Molot, de l’IFV qui s’exprimait à l’occasion des Quatrième entretiens vigne et vin en Languedoc-Roussillon, le 31 janvier. “ Ils germent lorsque les pluies sont supérieures à 2 mm et lorsque la durée d’humectation est supérieure à huit heures. Or, on a constaté un écart de cumul de pluies entre 2011 et 2012 très important. De plus, la croissance mycélienne qui intervient après la germination, est favorisée par un ensoleillement réduit. En avril 2012, ce dernier affichait une baisse de 40 % par rapport à avril 2011 et de 20 % en mai. L’humidité élevée jusqu’au début du mois de juillet a également favorisé cette croissance mycélienne. Mais ces facteurs météorologiques ont été défavorables à la sporulation, qui, elle seule, vue à l’œil nu, permet de détecter la présence du champignon. Seulement, quand celle-ci est détectée, il est bien souvent trop tard. ” Des facteurs agronomiques ont encore accru l’amplification du phénomène. Le gel de février a entraîné une très forte hétérogénéité phénologique, y compris sur une même souche. “ Difficile dans ces conditions de déterminer les stades sensibles. Et nombre de vignerons ont attendu l’apparition de beaucoup de stades sensibles avant d’intervenir ”, indique Bernard Molot.

Perte d’efficacité pour les QoI


Et puis, il y a les facteurs humains. “ Le risque mildiou étant faible et aisément gérable, un sentiment de sécurité s’est installé chez les viticulteurs qui ont donc adopté des techniques de pulvérisation “ light”  (espacement des traitements, moins de rangs traités à plus grande vitesse). D’où au final, un oïdium très présent. ” Dans cette énumération des facteurs favorables à l’oïdium, il ne faut pas oublier celui de la résistance. En calculant le facteur de résistance des familles chimiques, soit la dose efficace sur souches d’oïdium résistantes et sensibles, il a été constaté que pour DMI (ou IBS), ce facteur était inférieur à 20 et pour les QoI, inférieur à 1000. “ Ce qui signifie que pour les DMI, il faudrait traiter 20 fois plus pour retrouver une efficacité. Il y a donc érosion de cette dernière. Quant aux QoI, il faudrait traiter 1000 fois plus. On peut donc parler pour ces derniers, d’une perte d’efficacité. Ce facteur de résistance n’explique pas tout mais est un élément parmi d’autres ”, souligne encore Bernard Molot. Concernant les QoI, la résistance est présente dans toutes les régions avec des évolutions très rapides, selon les résultats du plan de surveillance, présentés par Jacques Grosman, expert national vigne au ministère de l’Agriculture. “ Nous avons constaté une perte d’efficacité à partir d’une seule application dans la pratique. Je vais donc proposer d’écrire dans la note nationale oïdium qui devrait être publiée prochainement, les phrases suivantes sur les QoI : dans les situations où la résistance est présente, l’utilisation d’une préparation à base de QoI seul, peut fragiliser le programme de protection. Par mesure de précaution, il est donc recommandé de ne pas dépasser une application par an et de préférence en association. ” Pour ce qui est des DMI, Jacques Grosman rapporte une perte d’efficacité, “ sans doute plus faible que pour les QoI et qui reste faible globalement ”.Une des morales à tirer de cette annus horribilis que fut 2012 est que le pilotage à vue de la protection anti-oïdium doit être proscrit. “ La phase qui s’étend de boutons floraux séparés à la nouaison doit être systématiquement protégée bien que l’oïdium soit alors invisible ”, rappelle Bernard Molot. Quant aux autres leçons à méditer, elles peuvent se résumer par la précocité du démarrage de la protection et l’alternance des familles chimiques pour échapper à toutes formes de résistance. Ces conditions étant posées, trois stratégies peuvent être mises en œuvre selon le vécu des parcelles, au cours de l’année précédente. Il y a le cas particulier des situations à drapeaux (l’oïdium se conserve alors à l’état de mycélium à l’intérieur des bourgeons) qui reste relativement anecdotique. La présence de drapeaux l’année précédente nécessite une voire deux applications durant la période 2 à 6 feuilles étalées. Les deux autres situations sont, par contre, beaucoup plus répandues : parcelles indemnes d’oïdium l’année précédente ou parcelles à problème. “ Ce qui va les différencier sera la date de positionnement du premier traitement ”, souligne Bernard Molot. “ Il n’y a en tout cas, aucun avantage à retarder le T1 car celui-ci interviendra dans la grande majorité des cas sur un oïdium déjà installé. Il faut alors pouvoir disposer d’un produit curatif mais tous les produits ne le sont pas. Et la pulvérisation ne doit pas être approximative, même et surtout, si elle intervient avant le démarrage de la protection anti-mildiou, afin de positionner le produit sur feuilles et inflorescences. Et ce, d’autant plus qu’il n’existe pas de produit anti-oïdium systémique. Si T1 est raté, la détection des symptômes interviendra, dans le meilleur des cas, environ trois semaines plus tard… Il faut donc privilégier une stratégie préventive en démarrant, notamment sur les parcelles sensibles, au stade 4-5 feuilles. ” Et Bernard Molot de préciser que cette tactique ne va pas augmenter le nombre de traitements au final. “ En 2012, alors que l’on n’a pas vu venir l’oïdium, on a procédé à des traitements de vengeance, allant alors jusqu’à 10 ou 11 traitements, qui plus est, inutiles sur oïdium sporulé. En fait, il y a environ 2,5 mois de protection à assurer, entre le stade 4-5 feuilles et la fermeture des grappes soit au total, 5 à 6 traitements, à comparer à la moyenne de 5,8 constatée en 2012, en Languedoc-Roussillon. On est donc dans les clous. ”

Viticulture biologique : les alternatives aux produits phytosanitaires


Les viticulteurs biologiques n’ont pas eu de problèmes particuliers de maîtrise de l’oïdium en 2012, précise Bernard Molot. “ Le soufre qu’il soit en poudre ou mouillable a son intérêt vis-à-vis de l’oïdium. Mieux vaut d’ailleurs un bon poudrage qu’une mauvaise pulvérisation. Néanmoins, le soufre mouillable nécessite une bonne qualité de pulvérisation et le soufre poudre est sensible au vent. Il faut aussi être prudent avec le soufre mouillable car on le raisonne à dix jours mais à dose pleine et hors lessivage. Du coup, sa durée de protection peut être inférieure à ces dix jours. ” Le cuivre peut aussi jouer son rôle contre l’oïdium. “ Des essais ont montré qu’à partir de 600 g/ha, l’application de cuivre avait une incidence sur le nombre de cleistothèces. ” Par contre, en hiver, un traitement à base de cuivre n’est que peu efficace tant les cleistothèces sont difficiles à atteindre, nichés au sein de l’écorce. Quant aux SDN et aux bio stimulants, aucun d’entre eux n’a démontré son efficacité contre l’oïdium.

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