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Pourquoi l’amélioration des retraites agricoles vire au casse-tête

Les sénateurs ont adopté le 19 mars un texte fixant un mode de calcul pour réformer les retraites des non-salariés agricoles sur la base des 25 meilleures années. Un vote contre l’avis du gouvernement qui propose un autre mode de calcul et une entrée en vigueur décalée à 2028. 

Marc Fesneau devant les sénateurs pour l'examen d'un texte sur les retraites agricoles
Marc Fesneau lors de l'examen de la proposition de loi présentée par Philippe Moullier sur les retraites agricoles.
© Sénat

L’une des revendications du mouvement de contestation agricole porte sur la revalorisation des retraites des non-salariés agricoles. Et la difficile mise en application de la loi Dive de 2023 instaurant le calcul des retraites agricoles à partir des 25 meilleures années constitue un point de crispation.

Attendu depuis plusieurs mois, un rapport de l’inspection générale des affaires (Igas) sorti en catimi avant le salon propose différents modes de calcul faisant dans chaque cas des perdants chez les agriculteurs.

Lire aussi : Le calcul des retraites agricoles sur les 25 meilleures années va-t-il faire des perdants ?

Quel scénario de calcul des retraites agricoles privilégié par le gouvernement ?

Les auteurs du rapport recommandent au gouvernement de retenir un système « de double liquidation à partir des flux de départ de l’année 2026 ». 

Concrètement, les pensions futures des retraités agricoles seraient la somme d’un premier montant de pension calculé selon les règles actuelles (retraite forfaitaire, retraite proportionnelle avec des points, prise en compte de toutes les années sans écarter les plus mauvaises) pour la partie de la carrière antérieure à 2016, et d’un deuxième montant de pension obtenu en appliquant la règle de calcul des 25 meilleures années de revenus professionnels agricoles sur les revenus professionnels pour la partie de carrière postérieure à 2015. Un scénario qui générerait 30% de perdants pour seulement 20% de gagnants, selon Pascale Gruny, sénatrice LR, rapporteur de la commission des affaires sociales.

Lire aussi : « Sur les retraites agricoles, on ressent vraiment du mépris de la part du gouvernement »

Les sénateurs adoptent un mode de calcul contre l’avis du gouvernement

Ce scénario déplaît fortement à la FNSEA soutenue par la Commission des affaires économiques du Sénat qui fait de l’absence de perdants une condition sine qua none à la réforme et regrette que le scénario visant à calculer les pensions agricoles sur la base des 25 meilleures années de points n’ait pas été étudié dans le rapport de l’Igas. 

Face à cette situation, le sénateur Philippe Mouiller a présenté une proposition de loi visant à préciser le mode de calcul des 25 meilleures années en ce sens pour une mise en application en 2026. Proposition de loi adoptée hier à l’unanimité par les sénateurs contre l’avis du gouvernement et transmise à l’Assemblée nationale.
 

Le gouvernement maintient son objectif de convergence avec l’abandon des points

Ecartant le motif budgétaire, Marc Fesneau a maintenu pour sa part, le 19 mars en séance publique, l’objectif d’associer à cette réforme des retraites agricoles une convergence vers un calcul sous forme de revenu et non plus de points. « Cette convergence est justifiée dans un contexte où la majorité des agriculteurs font de plus en plus d'allers-retours avec d'autres professions, avec de plus en plus de polypensionnés. Elle améliorerait la pension des agriculteurs en éliminant les mauvaises années », justifie le ministre de l’Agriculture.

Le régime de retraite agricole est particulièrement complexe, une chatte n’y retrouverait pas ses petits

« Le régime de retraite agricole est particulièrement complexe. Une chatte n'y retrouverait pas ses petits. Cela nuit à la lisibilité du système ; or les jeunes susceptibles de s'installer ont besoin de visibilité », a déploré le ministre de l’Agriculture lors des débats au Sénat.

« Nous sommes d'accord pour calculer sur la base des 25 meilleures années, mais cela soulève des questions […] Comment concilier un calcul fondé sur les 25 meilleures années et un système conçu pour assurer une redistribution ? Comment passer d'un régime par points à un système par annuités ? Comment faire entrer en vigueur dès 2026 une réforme qui nécessite des adaptations préalables ? La MSA a indiqué qu'elle ne pouvait pas reconstituer les cotisations avant 2016 », a-t-il exprimé le 19 mars devant les sénateurs. 

Une entrée en vigueur en 2028 à cause de problèmes techniques

Le ministre promeut un calcul sur le régime actuel à points pour la période antérieure à 2016 et sur la base des meilleures années pour la période postérieure à 2016 mais avec une entrée en vigueur en 2028, évoquant des « problèmes techniques » du côté de la MSA

C’est cette annonce d’un nouveau report de deux ans (la loi Dive instaurant initialement une entrée en vigueur en 2024) qui a poussé la FNSEA à claquer la porte d’une réunion de travail à Matignon le 15 mars. 
 

Un report de la réforme de deux ans inacceptable pour la FNSEA

« Cette proposition de report est inacceptable alors que les solutions techniques pour une mise en œuvre en 2026 sont à portée de main, en commençant avec les 25 meilleures années de points de retraite proportionnelle avant de basculer progressivement sur les 25 meilleures années de revenus », explique le syndicat majoritaire agricole dans un communiqué en date du 15 mars. 

Le dossier fait partie des points de cinq « blocs » de mesures prioritaires mis en avant par la FNSEA en vue d'une réunion avec le président de la République, pour lequel Matignon recherche des mesures de « sortie de crise 

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