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Manutention : Duel au pays des télescopiques

La chargeuse articulée télescopique peut-elle contester l’hégémonie du chargeur télescopique ? Réponse après une confrontation sur le terrain.

Contrairement à ce que laissent penser les ventes d’automoteurs de manutention sur le marché français, le chargeur télescopique n’est pas l’unique solution face au tracteur-chargeur. Très prisée dans certains pays comme l’Angleterre et l’Allemagne, la chargeuse articulée à bras télescopique peine à trouver sa place dans l’Hexagone. Afin de mieux appréhender les avantages et inconvénients des deux concepts, nous les avons mis à l’épreuve du terrain sur une exploitation de polyculture-élevage. Le choix des deux machines s’est basé sur les caractéristiques communes à l’une et l’autre, à savoir la puissance moteur, les performances hydrauliques et la transmission hydrostatique. Quant aux capacités de levage, si elles sont assez proches à la lecture des abaques, c’est une autre histoire à l’épreuve du terrain. Le gabarit plus imposant et la conception de la chargeuse jouent largement en sa faveur.

Sept critères de comparaison

Difficile donc de se fier aux chiffres annoncés pour les chargeuses, comme le confirment les deux constructeurs du test. Quant aux prix, la chargeuse annonce souvent un surcoût de l'ordre de 15 à 20 % par rapport à un télescopique de motorisation équivalente. La présence de deux marques différentes n’a pas influencé notre comparatif qui s’est basé sur l’analyse des deux concepts de manutention, sans tenir compte des particularités propres à chaque marque. Les deux engins ont été jugés sur sept critères, à travers différents travaux : curage de stabulation, relevage de tas de fumier, manipulation de balles et de sacs d’engrais, transport et divers travaux de cour.

Capacités du bras : Égalité

La mesure des vitesses de levée et de descente du bras est un indicateur du potentiel de débit de chantier des deux machines. Nous avons chronométré les temps de levage et de descente de deux balles rondes d’environ 300 kg avec chacun des deux automoteurs. La mesure a été effectuée à différents régimes moteur afin d’évaluer l’effet du circuit hydraulique : au ralenti, à 1 500 tr/min et à 2 000 tr/min. Nous avons également évalué l’effet du télescopage, en mesurant les temps de levée et descente avec bras rentré ou télescopé en simultané, jusqu’à la hauteur maxi. On notera d’ailleurs la plus grande facilité de la chargeuse à lever et télescoper le bras simultanément, quand le télescopique impose le plus souvent une décomposition des mouvements, malgré la présence d’un joystick électroproportionnel dans les deux cas.

Globalement, les résultats sont très nettement en faveur de la chargeuse. Même si les écarts se resserrent un peu en augmentant le régime moteur, le télescopique reste en retrait, notamment sur la vitesse de descente. Une partie de ces différences peut s’expliquer par le différentiel de hauteur de levage des deux machines. Flèche rentrée, la chargeuse lève à 3,55 m et le télescopique approche les 4 m. Flèche télescopée, la hauteur de la chargeuse se limite à 4,70 m, quand le télescopique atteint les 5,90 m. Reste qu’à hauteur comparable, les mouvements du bras de la chargeuse demeurent plus rapides. Au chargement de remorque ou de plateau, la position avancée de la flèche de la chargeuse facilite l’approche, sans télescoper, contrairement au chargeur télescopique qui impose souvent de travailler avec une flèche partiellement sortie. Mais pour empiler des balles, le chargeur télescopique garde une hauteur d’avance !

Dimensions et poids : Avantage télescopique

Le gabarit compact du télescopique tranche avec l’imposante chargeuse. Les principaux écarts se situent au niveau de la longueur et de la hauteur hors tout. En revanche, seuls 7 cm les séparent sur la largeur, différence qui s’explique par la taille supérieure des pneumatiques de la chargeuse. L’accès à des bâtiments bas est la principale limite de la chargeuse, même si sa hauteur de 2,50 m reste acceptable face à un chargeur télescopique standard. Côté poids, la chargeuse pèse une tonne de plus que le télescopique, un argument pour la stabilité et la traction, mais pas pour la consommation de GNR et la compaction.

Au transport : Avantage chargeuse

Sur la route, le chargeur télescopique se montre confortable, bien équilibré et relativement bien insonorisé. Ces avantages se vérifient également sur la chargeuse. En revanche, la conduite de cette dernière, plus brusque du fait de son articulation, demande un peu plus de vigilance aux conducteurs novices, d’autant plus que contrairement au télescopique, elle atteint 40 km/h. Cela s’explique par son type d’homologation « tracteur ». Les dimensions réduites des cabines de la plupart des télescopiques compacts ne permettent pas ce type d’homologation. Bien souvent, ils ne dépassent pas 25 km/h et sont homologués « engin spécial catégorie B ». Cela les contraint également à ne pas remorquer de véhicule, alors qu’une chargeuse en offre la possibilité, même si ce n’est pas son point fort.

Enfin, la position centrale du conducteur sur la chargeuse offre un avantage indéniable quant à la visibilité et à la facilité de placement sur la chaussée. La chargeuse prend donc le dessus sur le télescopique compact. Le verdict aurait sûrement été inversé avec un télescopique standard homologué tracteur.

Cabine : Avantage chargeuse

L’accès à la cabine est le seul point pour lequel le télescopique prend l’avantage. L’absence de marche contraste avec les deux marches à gravir pour accéder à l’habitacle haut perché de la chargeuse.

Une fois installé au poste de conduite, le duel de la visibilité est largement remporté par la chargeuse qui offre une visibilité à 360°, alors que sur le télescopique, la position basse et déportée de la cabine ampute la visibilité du conducteur. Seule la visibilité en hauteur est équivalente pour les deux engins.

En termes de confort, là aussi la chargeuse en impose, avec des volumes dignes d’une cabine de tracteur. On peut d’ailleurs accueillir un passager, chose inconcevable dans un chargeur télescopique. Une cabine plus grande, c’est aussi des vitres plus grandes et par conséquent davantage de luminosité. Le chargeur télescopique n’est pas en reste de ce point de vue, mais le volume plus faible de l’habitacle le rend plus sensible à « l’effet de serre ».

Entretien : Égalité

Que le moteur soit positionné à l’arrière, sur la chargeuse, ou sur le côté, sur le télescopique, l’entretien courant et l’accessibilité aux divers organes diffèrent peu et sont tout aussi aisés. Sous le capot latéral du télescopique, l’espace est vraiment maximisé pour intégrer tous les composants, notamment le dispositif antipollution. Sur la chargeuse, l’espace est moins compté avec des points d’entretien répartis de chaque côté du moteur.

Équilibre et traction : Avantage chargeuse

Le gabarit et la conception des machines donnent l’avantage à la chargeuse pour les travaux de traction et de poussée. Les performances de cette dernière ont dépassé nos espérances, même si le télescopique n’avait pas à rougir de ses performances tout à fait honorables. Premier constat, avec le télescopique, pour une meilleure visibilité, on prend l’habitude de télescoper un peu le mât, au détriment des performances, chose qui n’est pas nécessaire avec la chargeuse. De même, pour charger une benne, inutile de télescoper – ou seulement très peu – le mât, contrairement au télescopique. Ce dernier se retrouve ainsi plus fréquemment bridé par la norme EN15000, qui a pour but de limiter les mouvements aggravants.

La force d’arrachement est elle aussi en faveur de la chargeuse avec 4 800 daN, contre 4 200 daN pour le télescopique. La griffe chargée de fumier, le télescopique a tendance à lever de l’arrière, fait inexistant sur la chargeuse qui dispose pourtant d’un accessoire de plus grosse capacité. En revanche, le point de gravité haut et l’articulation centrale sont plus trompeurs dans les dévers par rapport au télescopique, campé sur un châssis fixe.

Pour la vidange, inutile de se déplacer pour ajuster la position du godet dans une benne : un coup de volant suffit à la chargeuse pour balayer toute la longueur de benne, ce qui n’est évidemment pas le cas pour le télescopique. De même pour se positionner latéralement en approche lors de l’empilement de balles. Tous deux équipés d’une transmission hydrostatique, ils ne jouent pas dans la même cour en termes de capacité de traction. Pour relever un tas de fumier, le télescopique reste au pied du tas quand la chargeuse grimpe sans mal. Au curage dans le bâtiment, le télescopique patine beaucoup plus vite. Cet engin compact est à privilégier pour les travaux de cour, grâce à sa maniabilité et à sa faible consommation. Au contraire, la chargeuse assure des prestations similaires à un télescopique de taille supérieure.

Maniabilité : Avantage télescopique

Du fait de son petit gabarit, il est clair que le télescopique compact part avec un sérieux avantage. Il passe partout, quelle que soit la configuration des bâtiments. Mais la chargeuse articulée, au gabarit plus imposant, s’en sort pas mal du tout. Par ailleurs, la chargeuse demande un temps d’apprentissage plus important, pour une bonne maîtrise du véhicule, alors que la prise en main du chargeur télescopique est plus rapide, malgré sa position de conduite déportée.

Avec la chargeuse, là où les roues avant passent, l’arrière de la machine passe ! L’articulation centrale préserve un bon rayon de braquage extérieur au niveau de l’accessoire. La différence avec le télescopique à châssis fixe est faible, alors que l’écart est beaucoup plus marqué pour le rayon de braquage extérieur aux roues. Dans certaines situations délicates, comme le long d’un mur, la chargeuse demande un peu d’expérience et de technique pour s’en sortir. Une fois la méthode acquise, c’est plus rapide que de se mettre en position crabe avec le chargeur télescopique !

Rédaction Réussir

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