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Proposition
Test de l'interprofession pour mieux valoriser le melon

Depuis cette campagne, les informations concernant les volumes et les prix seront disponibles aux acteurs de la filière, de l'amont et de l'aval. Explications.

Chaque année, le melon n'évite pas ses périodes de prix bas. Le plus souvent, cela se traduit par une ou deux périodes de crises conjoncturelles (cf. p. 31). Pour les limiter au mieux, l'interprofession a établi un protocole qui démarre cette année.

« La filière souhaite se repositionner, affirme Bernard Miozzo, l'animateur de l'Association interprofessionnelle du melon (AIM). Les professionnels mettent en place une action de partenariat gagnant/gagnant avec tous les acteurs de la distribution pour sortir de ces impasses dommageables pour tous les maillons de la chaîne. » Jusqu'à présent, Bernard Miozzo utilisait les cotations et les volumes des transactions melons effectués tous les jours par le RNM et destiné aux adhérents de la Section interprofessionnelle de première mise en marché (85 % de la production française).

Ces informations étaient ensuite synthétisées et globalement restituées au cours d'une réunion hebdomadaire organisé par Interfel à laquelle assistaient les acteurs de l'amont et de l'aval. « Je donnais une notion globale, précise l'animateur, une tendance de l'offre pour la décade à venir sans avoir – en retour – aucune information pertinente de la distribution. » Au fil des ans, des effets préjudiciables ont commencé à se faire sentir.

« Nous avons l'impression aujourd'hui d'être continuellement en promotion, affirme un opérateur de la production. Un client par exemple nous demande plusieurs semaines, voire plusieurs mois, à l'avance les volumes et les prix afin de préparer son catalogue de promotion. Mais à cette période, les fruits ne sont même pas formés ! Nous ne savons donc pas quelle quantité nous pouvons proposer. Cela est vrai pour tous les clients préparant un catalogue. » Le producteur ajoute : « La concurrence joue alors de concert. Quand une enseigne propose un melon en promotion, les autres magasins de proximité s'alignent sur ce prix même si au départ il était convenu à un niveau supérieur. Mais l'inverse ne se vérifie pas. Si le prix du marché est supérieur à celui qui avait été déter-miné deux ou trois semaines auparavant, l'enseigne, en général, impose de s'aligner sur le prix promotionnel. »

« Nous avons l'impression aujourd'hui d'être tout le temps en promotion ».

Contrairement aux autres fruits et légumes, cette concurrence est exacerbée. « La cucurbitacée française est la star de l'été, explique le producteur. C'est un produit d'appel, le seul dont le prix est retenu en mémoire par le consommateur quand il sort du magasin. » Par ailleurs le melon subit un fort handicap par rapport à d'autres fruits et légumes. Jusqu'à présent, les opérateurs n'ont pas réussi véritablement à segmenter le marché. Contrairement à nos voisins européens, le consommateur français n'apprécie que le melon charentais. Or de par le monde, les rayons regorgent de types différents : galia, canari, honeydew, vine peach, piel del sapo, ogen..., ce qui permet comme en tomates de proposer une véritable segmentation par types variétaux. En France, le melon charentais jaune côtoie le charentais vert. Mais, comme le déplore la profession, ces deux types voisins auraient tendance à se rejoindre grâce à l'évolution incontestable de la sélection variétale.

Différentiation par l'usage

La qualité reste désormais assez constante tout au long de la campagne, ce qui ne facilite pas les différenciations de prix. Les obtenteurs recherchent deux critères : un melon au goût prononcé (type charentais jaune) et une bonne conservation (type charentais vert), le graal pour ce fruit estival. Quant à l'emballage ou la présentation, aucune solution jusqu'à présent n'a véritablement apporté de satisfaction. Le conditionnement en filet ou le melon ciré (de la cire est appliquée sur le pédoncule du fruit) a fait long feu. Il reste encore un créneau qui n'a pas véritablement été testé, celui de la différentiation par l'usage, c'est-à-dire par le calibre, ce que demandent certains producteurs aujourd'hui. Les petits calibres (15 et 18) seraient destinés au mode “porto”, les gros calibres (11 et 9) pour des besoins familiaux et le calibre 12 pour un usage standard (70 à 75 % de la production française). Le mélange des trois catégories reviendrait à travailler sur l'emballage.

Aujourd'hui, le calibre joue parfois un rôle qui n'est pas sans conséquence pour la filière. Sous l'influence du climat, la grosseur des fruits peut évoluer plus ou moins vite. En début de saison, les prix sont souvent fixés sur le calibre 15, le plus petit. Or à la période fixée pour la promotion, les conditions climatiques peuvent être plus favorables et les fruits grossissent plus vite que prévu. En conséquence, le calibre 12 domine. Les prix, définis à l'avance et indiqués sur le catalogue, ne sont pas revus à la hausse même si le calibre dans le rayon est plus gros, le melon étant vendu à la pièce. Enfin, les metteurs en marché sont encore nombreux en melons, comparés aux autres produits. Autre situation atypique, le melon charentais est consommé à 90 % de sa production mondiale en France. En conséquence, la production est délocalisée surtout dans le bassin méditerranéen et même au-delà par les producteurs français.

Rendez-vous dans deux ans

Face à ces divers constats, Bernard Miozzo s'est donné deux ans pour tester ce partenariat proposé par l'interprofession en 2015. De mi-mai à mi-septembre, les cotations et les volumes sont relevés comme auparavant. La synthèse sera toujours effectuée et partagée via Interfel de façon hebdomadaire. Mais désormais les distributeurs peuvent être tenus au courant des évolutions du marché et des perspectives plusieurs semaines avant la récolte grâce à une connaissance et une approche plus fines du marché. Par exemple, quatre semaines avant la vente, les premières tendances en matière d'offres peuvent être estimées. Quinze jours avant l'achat la tendance est vérifiée, et huit jours avant elle est confirmée. Des situations inconfortables pourraient alors être évitées. « A chaque début de campagne, observe-t-il, la concurrence est vive entre les enseignes qui visent à être les premières à réaliser des promotions. Tel acheteur a fixé une promotion à telle date avec un certain calibre. Mais la production n'est pas encore au rendez-vous. Faute de marchandises, il arrive qu'il doive annuler son opération. »

Rendez-vous donc dans deux ans pour faire le bilan d'une telle démarche.

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