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Arboriculture : que valent les paillages en alternative au travail du sol ?

Technique alternative au désherbage, les paillages plastiques et les bâches tissées sont encore peu répandues en arboriculture. Les apports de l’expérimentation confirment que, sur poirier, ces couvertures remportent la mise.

Si le désherbage est un poste qui représente peu d’indice de fréquence de traitement (IFT) sur pomme et poire, il reste important pour l’implantation du jeune verger. « Sur les jeunes plantations, il n’y a pas d’autres alternatives que le travail du sol. C’est la technique la plus utilisée et qui nécessite un temps de travail, environ quatre à cinq passages par an, des tractoristes qualifiés et des investissements qui peuvent être importants dans le matériel de désherbage », explique Bernard Florens, chargé d’études sur l’espèce poirier à la station d’expérimentation La Pugère à Mallemort dans les Bouches-du-Rhône.

Dans ce contexte, la station d’expérimentation a réalisé une étude sur la mise en œuvre de paillages comme alternative, en collaboration avec le Criam Sud. L’essai a été mis en place dans les parcelles de la station en 2018, sur la nouvelle variété de poire Qtee® Celinacov, greffée sur Ba29 avec un intermédiaire Beurré Hardy. Six modalités ont été étudiées dans cet essai : la référence travail du sol, le paillage plastique microperforé avec épaisseur 80 microns, une bâche tissée polypropylène noir 130 g/m², et trois paillages biodégradables (toile tissée polypropylène 110 g/m², un feutre 150 g/m² et un paillage composé de 70 % jute et de 30 % sisal 1 000 g/m²). Un système de goutte-à-goutte a été posé au sol, et le paillage installé par-dessus. La gestion de l’irrigation a été réalisée spécifiquement en fonction des besoins de chacune des modalités.

Le paillage limite l’évapotranspiration

Au regard du bilan des trois années, on constate que le paillage limite l’évapotranspiration, ce qui se traduit par une économie d’eau par rapport au travail du sol de 30 % à 37 % sur les deux premières années de plantation. Pour la suite, en 2020, il n’existe pratiquement plus de différence par rapport à la modalité travail du sol, du fait du volume de végétation des arbres plus important en troisième feuille et de l’entrée en fruits. Le paillage plastique a permis également un gain de + 1,5°C sur l’été 2018 et + 1°C au printemps 2019. Sur la toile tissée, aucune différence de température n’a été relevée. Par la suite, il n’a plus été observé de différence par rapport à la modalité travail du sol, les arbres ayant poussé et produit de l’ombre sur le paillage. La perméabilité des bâches tissées et biodégradables permet une irrigation et une fertilisation par-dessus.

Croissance et mise à fruit avantagées

La croissance des arbres a aussi été suivie durant l’essai avec des mesures de circonférence des troncs. Des gains significativement supérieurs sur les arbres situés sous paillage ont été observés sur les deux premières années. « Au final, sur les quatre ans, on peut dire que le paillage permet un grossissement de tronc supérieur de 11 % par rapport à la modalité du travail du sol », indique Bernard Florens. La tendance se retrouve aussi sur les mesures de longueur de pousse. La différence de croissance des rameaux est moins marquée, mais elle reste supérieure pour les modalités bâchées, avec + 17 % pour le paillage plastique et + 12 % pour la bâche tissée. Avec 1,2 tonne supplémentaire, la différence de rendement observée entre les modalités est toujours favorable aux modalités bâchées pour la première année de production. Au regard de ces trois critères, le paillage a un effet globalement positif sur la croissance et la mise à fruit.

Durabilité, prix et pose très variables

Au bout des quatre années d’essais, le paillage plastique et le polypropylène sont toujours en place. Le paillage tissé compostable l’est également, même s’il commence à donner quelques signes de faiblesse en bordure. Les paillages en jute et en feutre se dégradent à la parcelle au bout de deux à trois ans. Une estimation économique comparative des différents coûts cumulés sur quatre années entre les paillages et le travail du sol a été réalisée. Dans le détail, le jute-sisal et le feutre ont une durée d’efficacité insuffisante par rapport à l’investissement, et la rentabilité de la bâche tissée biocompostable dépend de sa durée de vie. La toile tissée noire s’avère donc être le meilleur compromis investissement-durabilité.

La toile tissée noire, le meilleur compromis

Le coût de chaque type de paillage a été évalué pour une densité de 1 681 arbres par hectare, avec une pose comprise entre 120 et 220 h/ha. Le tuteurage des arbres et l’installation d’un goutte-à-goutte ont également été pris en compte, ainsi le coût de dix-neuf passages au total sur les quatre premières années pour le travail du sol, comprenant le coût du tractoriste, le coût spécifique du tracteur et du matériel. Au total, pour le travail du sol sur quatre ans, le coût s’élève à 4 000 euros par hectare (€/ha), contre 3 000 €/ha pour le paillage plastique et environ 5 000 €/ha pour la bâche tissée. Les paillages biocompatibles sont nettement plus élevés, avec 9 000 €/ha pour la bâche tissée compostable et autour de 6 500 €/ha pour le jute et le feutre. Le paillage se présente donc comme un investissement efficace et rentable par rapport au désherbage mécanique. Il permet de supprimer l’IFT herbicide, tout en favorisant une économie d’eau sur les deux premières années. La technique sécurise aussi l’implantation du verger, puisque le risque de se voir déborder par les adventices disparaît. Sur les différents matériaux utilisés, il ressort de l’expérimentation que la couverture plastique est la moins coûteuse tout en étant efficace. Les paillages biodégradables ont l’avantage de ne pas nécessiter de recyclage, mais leur prix est plus élevé.

Attention au campagnol sur les autres espèces fruitières

La sensibilité par rapport au campagnol pose beaucoup de difficultés dans les régions concernées par ce ravageur. En poire cependant, les porte-greffes utilisés sont peu attractifs. Les Farold® 87 Daytor et Pyriamcov, utilisés actuellement, sont plus vigoureux et plus rustiques. Si la présence de campagnols a été observée dans l’essai sous les différents types de paillage, les ravageurs n’ont causé aucun dégât sur les arbres. Sur pommier, cerisier, pêcher, prunier, abricotier et amandier, le risque de dégâts en fonction du porte-greffe et de la pression pourra en revanche être important, compte tenu de la sensibilité des espèces au campagnol.

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