Coopératives de nutrition animale : de la sécurité à la durabilité
> Jean-Luc Cade (au centre), président de Coop de France Nutrition animale, a convié Jean-Louis Zwick, président d'Oqualim et Christiane Lambert, vice-présidente de la FNSEA, à débattre des aspects qualitatifs du métier.
D « isposer d'un système de certification et d'analyse en amont est très rassurant pour nous », a témoigné la directrice sécurité du groupe laitier Sodiaal, Véronique Fontaine-Heim pour le compte du pôle Nutrition animale de Coop de France. On lui demandait son ” opinion sur Oqualim, l'association des fabricants d'aliments qui a mis en place la certification des usines d'aliments et le contrôle collectif des risques de contamination. « La nutrition des vaches influence toute la chaîne de valeur », rappelle-t-elle dans le document que Coop de France vient de publier pour faire connaître aux distributeurs et aux relais d'opinion les démarches mises en œuvre par les coopératives afin que le maillon de la nutrition animale soit le plus sûr possible. « Peut-on ne pas s'engager dans une démarche de ce type-là ? », a lancé le président d'Oqualim, Jean-Louis Zwick, sur l'estrade de la convention de Coop de France Nutrition animale le 5 novembre à Paris.
“ La nutrition des vaches influence toute la chaîne de valeur
Le président-directeur général de Sud-Ouest Aliment – le plus important fabricant du Sud-Ouest (filiale des coopératives Maïsadour, Vivadour et Gascoval) – a décliné tous les avantages d'Oqualim pour les fabricants d'aliments qu'il résume en deux phrases : « faire mieux et au même prix » et « gagner en écoute et réceptivité » vis-à-vis des clients, acheteurs de viande, d'œufs ou de lait. Il a assuré que toutes les interprofessions des productions animales allaient promouvoir la démarche et prédit la disparition, à deux ou trois ans, des opérateurs qui ne s'y engageraient pas. Faisant face à Jean-Louis Zwick, Christiane Lambert, vice-présidente de la FNSEA, a assuré que les éleveurs étaient tout à fait prêts à « entrer dans la boucle de progrès » par « nécessité éthique » ; qu'ils acceptaient des contraintes à partir du moment où elles visent la confiance, la pérennité et un retour économique.
La sécurité des filières animales, l'acceptation sociale de celles-ci et la performance économique étaient les trois jalons de la « Convention nutrition animale » organisée par la Coopération agricole le 5 novembre à Paris. Le président, Jean-Luc Cade, estime que « le modèle économique sur lequel se sont construites les filières animales doit être rénové de manière à créer collectivement de la valeur perçue tant par le consommateur que par le citoyen, et ce, sans perdre de vue notre impératif de compétitivité ». En phase de communication active envers le grand public, la Coopération agricole montre ses capacités à être proactive.
La majeure partie des aliments et compléments alimentaires consommés par les animaux d'élevage sont produits au sein des groupes coopératifs. Dans le cas des aliments composés, qui sont les principaux aliments industriels consommés, cette part est de 70 % (source officielle). Les coopératives ont 66 % du marché en élevage de porcs et plus de 55 % en élevage de volailles et de ruminants. La part de la coopération avait fait un bond considérable en 2007, quand InVivo avait acquis le groupe Evialis et revendu sa vingtaine d'usines à des groupes coopératifs régionaux.
Si les coopératives ne sont pas les seules à être engagées dans Oqualim, elles ont une responsabilité importante en termes de volume et une forte capacité de communication institutionnelle (comme la publicité actuelle sur le monde coopératif).
La certification Oqualim s'appuie sur un document de référence validé par les pouvoirs publics. Les usines certifiées prouvent chaque année auprès des vingt-neuf auditeurs qualifiés de onze organismes certificateurs leur capacité à appliquer les bonnes pratiques de leur spécialité (aliments composés, minéraux ou prémélanges). Cette garantie de bonnes pratiques du stade de la fabrication attend d'être complétée par deux systèmes de référencement : en amont, des fournisseurs d'ingrédients, et en aval, des transporteurs qui livrent les fermes. Plus de cent usines de groupes coopératifs sont ainsi certifiées, représentant 95 % de la production de ceux-ci. C'est aussi une démarche d'amélioration continue du fonctionnement des entreprises d'alimentation animale. « Nous avons amélioré ” la gestion des risques », témoigne Philippe Ducreux, responsable qualité de Atrial (groupe Euréa), qui fournit en aliments pour bovins le bassin allaitant du quart Sud-Est.
“ Nous avons amélioré la gestion des risques
Oqualim, en tant qu'association, met aussi en place des plans d'autocontrôle à l'encontre d'éventuels contaminants. Soixante-neuf sites de production coopératifs bénéficient de cette surveillance mutualisée, représentant 56 % de leur production. Ce dispositif s'est montré particulièrement utile à l'administration lors de l'alerte à la dioxine en Allemagne en 2011. Il sert d'appui aux plans de surveillance nationaux des salmonelles.
Coût du système : 290 000 euros (budget 2015) selon Jean-Louis Zwick, qui le rapporte à une vingtaine de millions de tonnes d'aliments (d'entreprises à capitaux coopératifs ou privés), soit presque rien. Mais le réel bénéfice recherché est d'éviter la multiplication des référentiels par clients et de simplifier les audits pour des aliments destinés aux filières sous signes officiels de qualité ou aux marques.
Soja responsableAinsi la garantie de sécurité cache d'autres enjeux sociétaux. Partant de leurs bonnes pratiques et des capacités qu'ils ont à les améliorer encore, les fabricants d'aliments peuvent mettre en place d'autres garanties, comme l'approvisionnement de soja responsable à l'égard de la forêt amazonienne. Le directeur scientifique de l'organisation WWF, Christophe Roturier, était un hôte de la convention du 5 novembre. Promoteur du soja RTRS*, l'ingénieur écologiste a participé cette année aux réunions professionnelles visant à faire accepter les filières animales à la société.
Des travaux sont en cours avec des organisations non gouvernementales (ONG) pour construire une charte des approvisionnements durables de l'alimentation animale.
*Table ronde pour le soja responsable : « RTRS », selon l'acronyme anglais.