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« J’ai mis sous le même toit tous les animaux à risques »

Au Gaec Holstein Alliance, dans les Côtes-d’Armor, les génisses en post-sevrage ou en transition alimentaire, les taries, les préparations au vêlage et les vêlages sont regroupés dans un même bâtiment. Un bâtiment pensé pour limiter au maximum le stress, et faciliter le travail et la surveillance.

« Plus on s’occupe des génisses et des vaches, plus on leur donne de confort, plus elles le rendent. » Lorry Beaucé, responsable de l’atelier lait du Gaec Holstein Alliance, en fait tous les jours le constat avec ses 175 vaches (150 vaches traites) et leur suite. L’élevage produit deux millions de litres de lait en système robotisé avec une moyenne à 38 litres par vache et par jour, des animaux qui font peu parler d’eux sur le plan sanitaire, et des génisses qui vêlent entre 21 et 25 mois avec une moyenne à 23 mois(1).

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Lorry assure seul avec un salarié le travail sur les vaches et génisses. Ici, les unes comme les autres sont toute l’année en stabulation. Sa ligne de conduite, pour mener à bien cet élevage très intensif ? « Anticiper, avoir de l’avance sur les problèmes en mettant en place une routine, résume ce jeune éleveur très rigoureux. Le meilleur moyen d’éviter les mauvaises surprises est de ne pas avoir à réfléchir à chaque fois qu’une tâche est effectuée. » C’est dans cette optique qu’il a choisi de regrouper sous le même toit les animaux en périodes à risque ou en transition alimentaire, et qu’il a pensé toute l’organisation de ce bâtiment.

Celui-ci a été construit en 2017 au moment de la deuxième phase d’agrandissement du troupeau, quand le troisième robot a été installé. « Il fallait revoir l’organisation, ce n’était plus possible de faire comme avant », souligne Lorry. Il a conçu lui-même le plan en s’inspirant de ses voyages à l'étranger. Notamment d'un élevage allemand de 3 000 vaches qui fonctionnait avec un manager et des salariés et disposait d'un bâtiment TMF (transition management facilities). Il répond à deux objectifs. Le premier est de permettre à une personne seule de faire le travail " sans se prendre la tête " et de se faire remplacer sans que cela ait d’impact sur la qualité du travail. Le deuxième est d’assurer le confort des animaux et de faire en sorte qu’ils ne cumulent pas plusieurs stress en même temps.

Se faire remplacer sans impact sur le travail

 

 

 
Au premier plan, la case de préparation au vêlage des génisses, puis les deux cases de préparation au vêlage des vaches. © A. Conté

Le bâtiment est ouvert sur le long pan orienté sud-est et sur une partie des pignons. Côté sud-est, sur une dalle bétonnée non couverte, sont installées des niches pour les génisses en post-sevrage avec courette : elles y sont logées par deux ou trois jusqu’à environ l’âge de 4 mois. Elles sont transférées dans ce bâtiment une semaine après leur sevrage (effectué sur trois semaines) pour les perturber le moins possible. Et continuent à recevoir la ration sèche ‘maison’ qu’elles avaient avant sevrage (une ration fine à base de paille-maïs grain-coques de soja-tourteau de soja-minéral). Cette ration est préparée pour la semaine et stockée à l’entrée du bâtiment. Toute la conduite alimentaire des phases à risques est pilotée et suivie par Philippe Arzul (Vitalac) par des contrôles mensuels (analyse de fourrages, contrôles sur sang et urines, suivi des événements sanitaires). Dans le prolongement des niches des génisses en post-sevrage, une dizaine de niches individuelles hébergent les petits veaux mâles avant leur départ de la ferme. « Ils restent ainsi à l’écart de la stabulation des vaches en lactation : cela permet d’éviter que les chauffeurs des camions n'entrent dans l’élevage laitier », précise Lorry.

 

 
Quand les génisses passent en case collective, à 4 mois, elles continuent à recevoir pendant deux mois la même ration sèche (à droite), puis passent à la ration mélangée. Un stress à la fois ! © A. Conté

 

Au bout de quatre mois, les génisses passent de l’autre côté du couloir d’alimentation, où se trouvent huit cases paillées de 6 mètres sur 12. Elles continuent à recevoir la même ration sèche pendant deux mois. Au bout de deux mois, le lot avance d’une case et passe en ration mélangée. La transition alimentaire se fait ainsi en douceur et sous surveillance. Cette nouvelle ration, composée de paille, foin, ensilage de maïs, soja et minéral, est elle aussi hâchée finement pour éviter le tri et favoriser l’ingestion. Trois cases sont dédiées aux génisses de 4 à 10 mois. À 10 mois, une fois passés la période à risque de postsevrage et le changement alimentaire, elles sont transférées dans un autre bâtiment à logettes. Ce qui a l’avantage de les habituer à ce type de couchage et de durcir leurs onglons. Elles reviennent dans le bâtiment  en moyenne à 22 mois pour la préparation au vêlage, une nouvelle période sous haute surveillance.

Une case de préparation au vêlage pour les génisses

 

 
Tout le matériel nécessaire à la prise en charge des veaux et vaches est stocké à portée de main face aux deux box. © A. Conté

Les cinq cases restantes sont réservées aux vaches taries, et à la préparation au vêlage. « Les génisses en préparation ne sont jamais mélangées aux vaches adultes pour éviter de les stresser ", souligne Lorry. Les vêlages se déroulent dans les cases de préparation. Une fois vêlées, les vaches et génisses sont transférées dans deux cases post-vêlage situées dans le prolongement des cases de préparation. « Tout est fait pour que les vêlages se passent sans stress. » Du pot trayeur jusqu’à l’ampoule chauffante pour le veau en hiver, tout le matériel nécessaire à la prise en charge de la vache et du veau est stocké à portée de main en face des deux box. Les veaux, installés provisoirement dans l’une des trois niches à côté des box, sont drenchés avec 4 litres de colostrum sitôt la vache traite. Un protocole de prise en charge des vêlages est défini. « Il est appliqué à chaque vêlage, cela évite les oublis. »

Le lendemain du vêlage, la mère et son veau (si c’est une femelle) quittent ce bâtiment des " périodes à risques ». Les petites génisses vont dans des niches individuelles alignées à côté du bâtiment des vaches en lactation. Elles reçoivent deux repas par jour d’un mélange de lait entier et poudre à 27 % de protéines, deux fois 3 litres la première semaine puis deux fois 4 litres. « Dès le premier jour, on leur met à disposition de la ration sèche, et à 1 semaine, elles sont vaccinées contre le RS, le PI3 et le BVD, écornées (avec de la pâte) et rechargées en fer en injectable. On fait toutes ces interventions sur les veaux le jeudi », précise Lorry. Quant aux mères, elles rejoignent l’un des trois lots du bâtiment à logettes des laitières, en fonction de leur rang de lactation : le lot de primipares, ou le lot des 2e et 3e lactation, ou le lot des anciennes, chaque lot disposant d’un box infirmerie paillé pour les vaches trop affaiblies après le vêlage. Et c’est parti pour une nouvelle lactation !

(1) voir aussi Réussir Lait, n° 339, octobre 2019, p.42.

Le protocole de vêlage

Vêlage dans la case de préparation
Transfert dans le box post-vêlage.
Donner l’eau tiède + ration mélangée des vaches en lactation
Traite dans le box au pot trayeur
Colostrum à la sonde et désinfection du cordon
Tonte de la queue, brûlage des poils de la mamelle, pose du collier
Si jumeaux : perfusion de calcium
Notification du vêlage (n° de la mère + sexe du veau) sur le groupe WhatsApp du Gaec

Côté éco

Coût total du bâtiment: 174 500 €HT

Charpente menuiserie 85 000 €HT
Terrassement 13 000 €HT
Maçonnerie 38 000 €HT
Électricité plomberie 13 900 €HT
Tubulaire 12 600 €HT
Cases et niches individuelles 12 000 €HT
….

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