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EN DÉTAIL
Un commerce urbain en plein champ

Philippe Méchinaud a créé avec son frère Pascal Les Délices de Thaïs il y a trois ans. Producteurs, mais aussi commerçants, ils savent combiner les atouts de ces deux métiers.

Le magasin Les Délices de Thaïs est implanté au milieu des plantes aromatiques, des tunnels abritant de nombreux légumes et longe les maisons de Haute-Goulaine en Loire-Atlantique. Ouvert depuis trois ans par Philippe et Pascal Méchinaud, l'enseigne génère aujourd'hui 450 000 euros de chiffre d'affaires avec les ventes au Min. Accueillant la clientèle de proximité tous les jours de la semaine sauf le lundi matin et le dimanche, elle draine en moyenne 130 clients le samedi.

La tomate cornue des Andes est récoltée dans les serres à proximité du magasin.

Les producteurs, devenus commerçants il y a déjà une quinzaine d'années en créant la SARL Méchinaud sur le Min de Nantes, ne ménagent pas leurs efforts pour attirer les consommateurs. Une vingtaine de plantes condimentaires, des fleurs alimentaires, des pommes de terre, des légumes ratatouille et apéritif, des carottes, des pâtissons, des aubergines et des poireaux en mini-légumes garnissent les étalages. Chez Les Délices de Thaïs – un clin d'œil à la nièce de Philippe, très gourmande –, on trouve également du concombre épineux, des pastèques, des radis, des carottes bottes ou des salades.

En complément de leur production – qui représente environ soixante-quinze variétés –, ils achètent la plupart des fruits, hormis les framboises cultivées sous abris mais aussi quelques légumes, principalement en hiver, l'ultra-frais restant de rigueur. Les acheteurs peuvent également profiter de la récolte du matin. Mieux, il arrive que le personnel aille cueillir spécialement le produit réclamé. Par ailleurs, l'approvisionnement au Min s'effectue tous les jours, du mardi au samedi dès 5 heures du matin, mais aussi chez quelques producteurs voisins, comme pour la fraise.

Les variétés sont choisies spécialement pour leur goût, leurs arômes, leurs spécificités rares. Ainsi, pas moins de six menthes différentes (marocaine, poivrée, chocolat, panachée, banane, bergamote) sont proposées. Parmi les douze variétés de tomates, la “vraie” cornue des Andes, l'Aligote, une cerise allongée à chair sucrée très aromatique, hybride Vilmorin... Quant aux fruits achetés au Min comme les pêches, ils finissent leur mûrissement dans l'arrière-boutique avant d'arriver sur les étalages.

Des légumes espagnols en hiver

Pour la provenance, Philippe Méchinaud joue la transparence. « Dans le magasin, montre-t-il, les origines sont clairement identifiées. En été, les légumes proviennent à plus de 90 % de l'exploitation Méchinaud. Ils sont estampillés “Origine France Maison”. J'assume cet étiquetage même s'il ne correspond pas exactement à l'usage. Mais il est nécessaire à notre clientèle. En hiver, de nombreux légumes proviennent d'Espagne. Car comment pourrions-nous offrir des produits à prix raisonnable ? Je défends le producteur espagnol qui, comme nous, cultive les légumes avec le moins de pesticides possibles et agit pour respecter l'environnement. »

En complément des fruits et légumes, le magasin propose aussi des épices, des fruits secs, du pain, du fromage et du beurre local, des légumes insolites comme le raifort d'Autriche, de l'huile d'olive en libre-service originaire de Montpellier.

Diversité et qualité ne résument pas les efforts des Méchinaud qui n'hésitent pas à retrousser les manches pour cuisiner. Tous les samedis matin, après son passage au Min, Philippe Méchinaud confectionne avec ses deux salariées, Marie et Morgane, le plateau apéro, une centaine par semaine. Sur une latte de peuplier, le client dispose ainsi de légumes prêts à consommer. Il en coûte 3,50 euros la portion. Par ailleurs, à tour de rôle, ils se mettent au fourneau, dans le coin cuisine, aménagé à l'entrée du magasin. « Nous voulons montrer comment nos produits peuvent se cuisiner simplement, souligne-t-il. Occasionnellement, un chef cuisinier vient nous remplacer. Il a carte blanche mais il doit respecter la même consigne : montrer une cuisine simple et savoureuse. » Les clients sont prévenus par e-mail. Outre le menu du samedi, les nouveaux arrivages, les produits pour les confitures ou conserves y sont signalés régulièrement.

L'expérience du Min

A l'ouverture des Délices de Thaïs, les deux frères producteurs ne se lançaient pas dans un domaine inconnu. Depuis le rachat de l'exploitation de leurs parents, Robert et Marie-Thérèse il y a quinze ans, ils ont toujours commercialisé leurs produits sur le Min de Nantes. Dans le sillage de leurs aînés, ils ont continué à produire et à vendre plantes aromatiques, fleurs alimentaires et petits légumes. Un vrai succès. Les deux frères mènent alors de front l'exploitation et le commerce du Min, régis sous la forme d'une SARL.

Pour satisfaire le client qui demande des plantes aromatiques douze mois sur douze, ils commencent très vite à acheter de la marchandise pour compléter leurs cultures. Le carreau du Min s'est agrandi progressivement pour atteindre aujourd'hui 2 000 m2 . L'exploitation s'est, elle aussi, développée. Au départ l'EARL Méchinaud se résume à 4 ha de production. En pleine ville, l'agrandissement complique la gestion des cultures.

La zone de production se divise aujourd'hui en quatre sites dont le dernier a été acquis l'an passé, pour totaliser plus de 7 ha de plein champ, 1,5 ha de serres verre et 5 ha d'abris plastique. « Notre dernière acquisition de 4 ha, remarque le maraîcher, est située à 2,5 km seulement de notre siège d'entreprise. Nous profitons en fait de la déprise viticole. Mais il nous faudra sans doute une dizaine d'années pour que cette parcelle acquière la matière organique nécessaire et la souplesse dont elle a besoin pour nos cultures. »

En 2006, les frères Méchinaud ont cédé leur entreprise commerciale du Min transformée en SAS à Antoine de La lande d'Olce, sans doute pour se soustraire du régime quasi infernal auquel ils se soumettaient. [En avril 2005, fld magazine indiquait : « A l'heure où les salariés vont se restaurer, c'est encore l'effervescence dans les cases de Méchinaud au Min de Nantes… Le client est servi de 3 heures 30 à 18 heures du lundi au vendredi et de 4 heures à 10 heures le samedi. »] « Nous sommes désormais actionnaires minoritaires chez SAS Méchinaud, souligne Philippe, qui est devenu notre principal client. »

La production n'est jamais un long fleuve tranquille. Il y a quatre ans, le marché de la fleur alimentaire s'est effondré. Il représentait jusqu'à 15 % du chiffre d'affaires de l'exploitation. « La crise explique en partie cette déconvenue, analyse-t-il. Mais je crois aussi que ce type de produit est passé de mode. Vu l'impact sur notre chiffre d'affaires, il fallait réagir. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de construire ce magasin. »

Les Délices de Thaïs entame donc sa troisième année. En production, l'exploitation se prépare à la certification GlobalGap, une exigence de la SAS Méchinaud, pour la fin 2013. « Cela va nous permettre, espère le maraîcher, d'améliorer la traçabilité, de mieux rationaliser les plannings et les conduites de culture afin que des années comme 2012 qui ont été une catastrophe pour nous en termes de production – nous n'avons récolté aucun poivron et le potentiel de tomates a été divisé par deux – pèsent moins sur les marges économiques. »

UNE RECHERCHE CONTINUE EN FRAÎCHEUR ET QUALITÉ POUR SURPRENDRE LES CLIENTS Marie Bizot, salariée

Durant mes études d'assistante sociale, j'ai travaillé durant six ans comme saisonnière à la production pour les récoltes et les entretiens. Sans travail, j'ai saisi l'opportunité d'un poste qui s'est libéré ici il y a un an. Car je suis tombée littéralement amoureuse des produits que nous vendons. J'aime aussi beaucoup le contact. Petite structure, nous sommes deux personnes à temps complet pour le magasin en dehors de Philippe Méchinaud, quand l'exploitation compte douze permanents et dix saisonniers pour l'été. Ma tâche est des plus variées : vente, secrétariat, comptabilité, voire récolte si nécessaire. Je participe aussi à la cuisine du samedi. J'aime beaucoup cuisiner. Dernièrement, nous avons mijoté un velouté de petits pois et un gaspacho de concombre à la menthe.

Marie-Paule Bore, consommatrice

Je viens faire mes courses ici depuis l'ouverture, c'est-à-dire octobre 2010. J'habite à 7 km environ. J'apprécie la qualité des produits et leur fraîcheur. Le turn-over est rapide. Les fruits et légumes ne sont pas trop manipulés. Et nous pouvons demander conseil. Quant aux prix, ils s'alignent sur ceux des supermarchés. Les propositions par mail des Délices de Thaïs m'intéressent. Je venais aujourd'hui acheter des abricots pour faire de la confiture suite à leur annonce d'il y a trois jours. Mais malheureusement, j'arrive trop tard. Aujourd'hui, c'est l'opération “tomate à cuire”. Je suis moins intéressée. Néanmoins, je ne suis pas venue pour rien. J'ai refait quelques provisions.

© D. R. Alexandre Couillon, restaurateur de la Marine à Noirmoutier

Son établissement, vingt couverts et un seul menu, vient d'acquérir 2 étoiles au guide Michelin. Il s'approvisionne chez Méchinaud pour beaucoup de légumes. Très précis dans ses commandes, il s'adapte néanmoins aux fluctuations de la production. « Selon les recettes, je commande des concombres de 6 ou 15 cm. S'il ne peut me fournir, je remplace le concombre de 6 cm par des carottes puis du poireau pour accompagner le homard servi avec une crème de moule et salicorne et légumes grillés à la braise de pin maritime. Et je vais certainement confire les très grosses tomates cornues des Andes à 60 °C toute la nuit pour en faire une crème acidulée. Avec Philippe, nous communiquons pratiquement tous les jours. »

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