Aller au contenu principal

FRUIT LOGISTICA - Un fruit à l’école
2011, année de test pour les fruits à l’école

L’enveloppe du School Fruit Scheme est loin d’être dépensée. La mise en place des programmes nationaux est à la discrétion des gouvernements. Revue de détail.

A l’origine déclarée comme une mauvaise idée par les services de la Commission européenne, la distribution de fruits à l’école a réussi son passage en force. C’était en 2007 à l’occasion du congrès EGEA que tout a basculé. « Au départ j’étais contre cette distribution, expliquait Lars Hoelgaard, directeur adjoint de la DG Agri, lors de la dernière réunion Aprifel organisée en décembre à Paris. Je trouvais que c’était une mauvaise idée. Et c’est avec les présentations des chercheurs que j’ai pris conscience des aspects préoccupants de l’obésité grandissante touchant particulièrement les enfants européens. Je me suis alors battu pour convaincre mes collègues d’instaurer un budget dédié à la distribution des fruits à l’école. Pour arrêter cet effet boule de neige qu’allaient coûter cette progression de l’obésité et son coût en termes de santé publique. » Selon les dernières données de la Commission européenne, 22 millions d’enfants sont en surpoids dans l’UE à 27 et 5,1 millions d’entre eux nécessitent un traitement médical. Lars Hoelgaard avait ainsi réussi à motiver la Commission européenne en démontrant tous les bienfaits d’une telle distribution quant à la réduction des dépenses de santé à long terme, un coût estimé à près de 150 milliards d’euros. Il avait à l’époque bien mentionné toute l’importance d’un programme mené à long terme, accompagné d’un suivi pédagogique fort pour entraîner une augmentation de la consommation de f&l tout au long de la vie. La DG Agri avait alors demandé le soutien de la DG Sanco (Santé consommation) sur un tel programme.

Une rencontre Un fruit à l’école organisée par l’Areflh à Bruxelles
« J’ai mis en avant un argument de marché : cette augmentation de consommation pouvait être vue de manière positive pour les producteurs de f&l européens. » Lors de la réunion organisée par l’Areflh* le 8 novembre dernier, au comité des régions à Bruxelles, Emmanuel Jacquin de la Commission européenne estimait nécessaire d’ajouter nutrition, santé et agriculture dans le programme éducatif de tous les petits européens. Il encourageait aussi les autorités publiques d’éducation, de santé et d’agriculture à travailler ensemble pour une bonne application du programme. Et bien évidemment à l’implication forte de tous les acteurs de la filière fruits et légumes. Depuis la mise en place du programme SFS à la rentrée 2009-2010, l’association européenne Freshfel n’a cessé de donner de la voix tant sur la non-utilisation des fonds dédiés à la communication que sur le bon fonctionnement du programme lui-même au niveau des 27 Etats membres. Et jusqu’à il y a quelques mois, elle fustigeait le manque d’engouement de la part de la Commission. Freshfel avait notamment appelé à la création d’un site web dédié au programme et à la mise en place d’un groupe d’experts chargé d’évaluer les programmes des Etats membres.
Une demande entendue, puisque, fin octobre, Bruxelles appelait à candidature pour la formation d’un groupe d’experts, alors que le site internet devrait bientôt voir le jour. « Il reste à espérer que ces nouveaux instruments stimuleront les Etats membres dans l’exécution de programmes efficaces en étroite collaboration avec le secteur pour que l’ensemble du budget disponible soit utilisé, car lors de la première année seulement 30 % de l’enveloppe financière ont été utilisés par les Etats membres », rappelle Philippe Binard, secrétaire général de Freshfel. Une faiblesse d’utilisation des fonds que l’on retrouve en France ou encore en Allemagne (cf. graphique). En l’espace d’un an, la France a ainsi perdu plus de la moitié de son budget européen passant de 12 M€ alloués à 5,60 M€. Outre Rhin, le budget européen a fondu de moitié de 20,82 M€ à 9,97 M€.

La France figure de proue se noie dans une distribution trop hétérogène
A l’origine, pourtant, la France faisait partie des Etats fortement impliqués, et faisait réellement figure de proue. Michel Barnier, à l’époque ministre de l’Agriculture, avait même lancé le programme “Un fruit à la récré”. C’est d’ailleurs sous présidence française que ce programme est devenu européen. Mais aujourd’hui, le soufflé a tendance à retomber. Son application sur le territoire français reste faible. Il y a près de deux ans, le ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, souhaitait atteindre le million d’enfants bénéficiant de l’opération dès la rentrée 2010. Malheureusement, l’objectif est loin d’avoir été atteint. Tout juste la France totalisait-elle les 300 000 élèves au 7 septembre répartis dans 3 067 établissements. Le budget européen a été revu à la baisse. Car la décision reste de la volonté des communes voire des directeurs d’établissement qui doivent se porter volontaires. Pour montrer son attachement à cette nouvelle politique de promotion, le ministère de l’Agriculture a décidé depuis la rentrée d’ouvrir la distribution aux collèges et lycées, mais nombreux sont ceux qui estiment que la décentralisation aux communes et régions n’a pas que du bon. Nombre d’établissements ne sont tout bonnement pas au courant de cette offre national de distribution de fruits, déplorait à ce sujet Christine Lainé, en charge du dossier au ministère de l’Agriculture, lors du congrès des Maires, fin novembre. Côté école, la mise en place est estimée difficile par les directeurs d’établissement. En prenant pour exemple la région Ile de France, on constate clairement une disparité d’application. A ce jour, 282 écoles distribuent des fruits dont 44 à Paris. Faible pour l’une des régions les plus peuplées de l’hexagone. « On note clairement quelques freins comme le fait que les collectivités doivent financer le programme à hauteur de 49 %. Il est aussi nécessaire de favoriser la diversité d’approvisionnement en produits qu’ils soient frais ou transformés », indiquait Antoine Lebel lors d’une distribution de fruits dans une école primaire parisienne.
En Italie, la tendance est inversée à celle de la France. Et ce alors que l’Italie fait partie des pays grands consommateurs de fruits et légumes (les Italiens consommant plus de 400 g/jour de f & l soit plus que le grammage conseillé par la FAO et l’OMS. Ainsi, l’allocation européenne pour l’Italie a progressé de plus de 5 millions d’euros entre la rentrée scolaire 2009 et celle de 2010 et dépasse les 20 millions d’euros. Les régions du Nord sont fortement impliquées. En Emilie-Romagne par exemple plus de 55 000 enfants profitent d’une distribution hebdomadaire, dans la région de Venise c’est 66 000 écoliers. Selon les données présentées par Mario Tamanti, du groupe italien Apofruit, c’est d’ailleurs cette région qui remporte la palme de la distribution. Sous le slogan “Frutta nelle Scuole, le bilan 2009-2010 est plus que positif. Des emballages spécifiques porteurs du logo du programme italien ont même été créés spécifiquement. Selon les données d’Apofruit, on note ainsi plus de 227 t de fruits distribués durant l’année scolaire 2009-2010. Plus intéressant, Mario Tamanti indique que les écoles des régions du Nord ont distribué majoritairement de la pomme entière (137 t) coupée en quartier (132 t) ainsi que des agrumes (153 t). Les autres fruits entiers (poires (23 t), fraises (32 t)) ne remportant pas autant de suffrage ou n’étant pas présent tout au long de l’année. Dans les régions du Centre de l’Italie, les distributions sont quasi-identiques (pommes et agrumes en tête). A noter la présence de distribution de kiwis entiers Au total, sans compter les régions du Sud, plus de 310 000 écoliers ont pu consommer des fruits à l’école.

Un agenda chargé, si les professionnels souhaitent soutenir le programme SFS
Pour l’Espagne, l’Areflh avait demandé à Manel Simon, le directeur de l’association des producteurs, Catalonia Qualitat, d’en présenter un bilan après une année de test. « En Espagne, le financement du programme est porté par les Communautés autonomes. La mise en place du programme est donc tributaire de la volonté de chaque région. En Catalogne, cette distribution est coordonnée par trois départements : agriculture, santé et éducation. » ce programme s’intitule + Fruits ! « Pour la rentrée 2010, la région catalane a reçu 2,332 millions d’euros répartis entre Catalonia Qualitat et Asofruit. Les mesures d’accompagnement représentent 150 000 euros. » Selon les chiffres donnés par Manel Simon, c’est la Communauté de Valencia qui a reçu les plus importantes subventions européennes (1,7 M€) suivie par la Catalogne (1,166 M€) en revanche, trois régions ne présentent pas de subventions : Cantabria, la Rioja et Madrid. Cette année, l’Espagne a fait le même choix qu’en France, ouvrir la distribution à des enfants plus âgés. Une manière d’augmenter le nombre d’enfants susceptibles de recevoir les fruits.
Par ailleurs, la semaine dernière, le 12 janvier, il était prévu un point d’étape à la Commission européenne, avec l’ensemble des parties prenantes du programme SFS décliné dans les 25 Etats membres participants. Début décembre, Lars Hoelgaard, grand ambassadeur du programme, avait appelé les acteurs de la filière française à participer assidûment à cette réunion. « C’est le moment de profiter de cette rencontre avec le Commissaire à l’agriculture, Dacian Ciolos, de démontrer les bienfaits santé d’une telle distribution de fruits dans les écoles. La grande différence entre la DG Sanco et DG Agri, c’est les fonds dont elles disposent. En démontrant le bienfait économique pour le marché et surtout la bonne image que cela renvoie quant à la politique européenne agricole, à l’heure où celle-ci est en pleine réforme pour l’après-2013. Il y a une carte à jouer pour l’ensemble du secteur producteur européen de fruits et légumes. Nous sommes réellement dans une phase critique pour les budgets à venir. C’est à vous professionnels du secteur de donner une orientation à ce programme, vous avez réellement une responsabilité à prendre dans cet exercice d’augmentation de la consommation de f&l », avait-il martelé.
En février, une discussion sera également engagée quant à la mise en place d’un groupe d’experts scientifiques, dédié à ce programme comme le demandait l’association Freshfel depuis le lancement du programme à la rentrée 2009. Ce groupe d’experts aura pour mission de confirmer l’effet bénéfique des fruits et légumes sur la santé et plus particulièrement des enfants. Par ailleurs, Lars Hoelgaard a rappelé que dans l’OCM fruits et légumes, il existait des solutions de soutien plus importantes (financements à hauteur de 60 % par Bruxelles) dans le cadre d’opération de promotion dédié aux adolescents et aux enfants. Il a également ajouté que la Commission européenne ne serait pas contre donner davantage de moyens pour des projets de recherche justifiant cette politique de distribution et de promotion de fruits et légumes. Pour autant, il a appelé les Etats à s’engager plus activement. « L’enveloppe européenne est fixée pour l’heure à 90 millions d’euros. Avec un soutien identique à l’échelle nationale cela représente un budget total européen pouvant avoisiner les 150 à 160 millions d’euros ! » Reste à chaque Etat membre d’avoir la volonté clairement affichée de s’approprier comme il se doit cette distribution. Si en Espagne la régionalisation fonctionne fortement bien, ce n’est pas forcément le cas de la France.

* Areflh : Assemblée des régions européennes fruitières et légumières et horticoles

Les plus lus

Salon de l’Agriculture : C'est Qui Le Patron ?! débarque sur les fruits et légumes

La démarche C’est Qui Le Patron ?! (CQLP) qui assure une juste rémunération pour le producteur et qui s’est fait connaître sur…

Emballage plastique des fruits et légumes : le Conseil et le Parlement UE s’accordent sur une interdiction

Le Conseil et le Parlement sont parvenus lundi 4 mars à un accord provisoire sur le projet de règlement Emballages, texte issu…

Salon de l’Agriculture : la noisette française Koki a un message à faire passer au président Macron

La coopérative Unicoque et l’association de la noisette française ANPN ont écrit en semaine 8 un courrier au président de la…

Fraises hors sol cultivées en France
Fraise française : un bon début pour la commercialisation... à poursuivre

En retard par rapport à l’an dernier, la saison de la fraise française a bien commencé d’autant que la fraise espagnole est…

Remise de la Légion d'Honneur à Laurent Grandin par Marc Fesneau au salon de l'Agriculture 2024.
Plan de souveraineté fruits et légumes : 100 M€ supplémentaires en 2024

Au salon de l’Agriculture, Marc Fesneau a débuté la journée du 29 février sur le stand des fruits et légumes frais afin de…

Vignette
La banane de Guadeloupe et Martinique a été entendue par Emmanuel Macron, quelles sont les 4 grandes mesures annoncées ?

En marge du Salon de l’Agriculture, les acteurs du monde agricole ultramarin ont été reçu à l’Elysée par Emmanuel Macron qui a…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 354€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site filière Fruits & Légumes
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière fruits & légumes
Consultez les revues Réussir Fruits & Légumes et FLD au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière fruits & légumes