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Les fruits et légumes profitent-ils de l'expansion ?
Auchan, le pionnier du drive

« Le drive semble taillé pour la crise », expliquait récemment Sonia Da Silva, chef de groupe chez Kantar Worldpanel. Mais les f&l profitent-ils véritablement de cette explosion du e-commerce ? Eléments de réponse en Nord-Pas-de-Calais.

C'est le 21 juin 2000 qu'ouvre officiellement le drive-in d'Auchan Express de Leers, situé à deux pas de la frontière belge. Implanté à côté de l'hyper, il offre la possibilité aux consommateurs de faire « le plus gros de leurs courses sans quitter leur volant ». Les consommateurs pressés peuvent passer commande sur une borne informatique située sur le parking… et quelques minutes plus tard, un vendeur dépose les produits commandés dans leur coffre. Près de 120 produits sont proposés : packs d'eau, de bière, produits d'hygiène, et autres pondéreux mais aucuns fruits et légumes ! A l'époque, il n'est pas encore question de commandes effectuées sur Internet. Le choix des produits est limité, les services aussi. Le drive veut avant tout soulager le consommateur de la corvée des pondéreux.

Concurrences néfastes

Quatre ans plus tard, Chronodrive ouvre son premier magasin de Marcq-en-Barœul en février 2004. C'est le premier drive avec commande passée sur Internet imaginé en 2002 par Ludovic Duprez et Martin Toulemonde avec l'appui du groupe Auchan. L'ex-directeur des collections Kiabi et l'ex-directeur Argentine du groupe Bonduelle ont testé la formule dans le magasin Atac de Linselles avec 200 clients, puis lancé deux ans plus tard “Les courses en 5 minutes après commande sur Internet !”.

Le groupe de distribution nordiste n'est pas en reste et lance à son tour en 2006 son tout premier Auchan Drive accolé à l'hyper de Faches-Thumesnil (Nord) dirigée à l'époque par… un certain Arnaud Mulliez. Testée dès 2000, la formule était inspirée du concept “Drink Shop” développée au Luxembourg. Avec Auchan Direct créé en 2001 (la livraison des courses à domicile après commande sur Internet) et Auchan Drive en 2006, puis quelques années après avec Chronodrive, le groupe nordiste s'ouvre le champ du e-commerce.

Car Auchan Drive et Chronodrive se développeront en parallèle jusqu'en 2010, année où Auchan rentrera au capital de Chronodrive à hauteur de 85 %... évitant ainsi certaines concurrences néfastes qui commençaient à naître sur le terrain.

Demeurés jusque-là très discrets sur ce volet e-commerce, les responsables d'Auchan France et de Chronodrive ont réagi au projet de loi de Sylvia Pinel, ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme, visant à encadrer le développement des drives.

Vincent Mignot, directeur général d'Auchan France, et Jean-Philippe Grabowski, directeur général de Chronodrive, ont défendu la vraie nature du drive le 10 juillet 2013 avec comme slogan : “Le drive, c'est un service, pas un magasin !”. Et rendent public pour la première fois quelques données chiffrées (cf. encadré ci-contre).

Un partenariat avec la Scofel

Les fruits et légumes font partie des 3 500 références proposées dès le départ aux huit bornes et aux douze quais du premier Chronodrive de Marcq-en-Barœul implanté près de Lille, puis de celui de Croix. Ouvert le 17 octobre 2006 sur 11 000 m2 , ce dernier comporte déjà 5 200 références.

Jusqu'en 2010, les deux enseignes ont eu un “sourcing” fruits et légumes indépendant. Les Auchan Drive sont approvisionnés par les Scofel. Du côté des Chronodrive, en revanche, les fruits et légumes sont fournis au départ par les Ets Rosello d'Arras, puis par des grossistes comme Charlet, Pomona et Fort & Vert sur la base tarifaire d'Atac.

« On a travaillé à la constitution de la gamme fruits et légumes en leur proposant une vraie offre de produits de qualité », se souvient Frédéric Joan, responsable e-commerce et GMS des Ets Charlet. « Mais si on observe actuellement des progressions de l'ordre de 20 % pour les drives, les fruits et légumes ne progressent que de 4 % », regrette-t-il cependant.

Depuis la prise de contrôle majoritaire du groupe Auchan sur Chronodrive en 2010, c'est désormais la Scofel de Libercourt (la centrale d'achat fruits et légumes d'Auchan) qui fournit à la fois les Chronodrive et les Auchan Drive de la région Nord. « Auchan France me propose une politique commerciale que je suis libre de suivre ou de ne pas suivre », nuance cependant Arnaud Coursault, responsable de gamme nationale fruits et légumes, poissonnerie et boulangerie chez Chronodrive.

L'enseigne a beaucoup progressé dans son offre fruits et légumes et a mis les moyens. Du produit basique, les fruits et légumes ont fait progressivement l'objet de toutes les attentions. Avec un responsable dédié, des journées de formation organisées à destination des préparateurs de commandes… les spécificités fruits et légumes ont été prises en compte.

L'enseigne a recruté Grégoire Bodin qui a lancé des cahiers des charge spécifiques, mis en place le partenariat avec la Scofel et s'est occupé de la professionnalisation des équipes à partir de sept magasins pilotes. Au bout de quelques années, les résultats sont là : « Si au départ un client sur quatre n'achetait pas de fruits et légumes, ils ne sont plus qu'un sur deux actuellement », précise Arnaud Coursault.

« Dans les drives, on offre une gamme de fruits et légumes la plus proche de celle proposée en magasin, excepté néanmoins les produits vendus en vrac », explique Bernard Bourdon, chef de groupe à la Scofel de Libercourt. Mais le drive ne peut aller trop loin dans la segmentation et dans l'offre d'une gamme complète.

Le rayon est sur le site

Dès le départ, les promoteurs des drives ont su que leurs clients rentreraient par les volumineux (eaux, couches bébés, petits pots…), puis par les PGC et qu'ils gagneraient ainsi progressivement leur confiance. Dès lors, ils pourraient ainsi leur proposer les fruits et légumes, la viande et enfin le poisson, produit ultime du lien de confiance établi entre le client et “son” drive ! Comment pallier les inconvénients des drives qui ne permettent pas de voir, sentir, toucher les fruits et légumes proposés ?

Arnaud Coursault souligne la pertinence du site du Chronodrive qui comporte le maximum d'informations dédiées aux fruits et légumes.

Quant à Bernard Bourdon, il met en avant la spécificité des drives : « On développe les produits à la pièce et les conditionnements spécifiques à ce canal de distribution.» Mais ce n'est pas tout : « le drive bénéficie d'une meilleure clarté de l'offre et les petits produits ont la même chance que les poids lourds du secteur », ajoute-t-il tout en précisant : « c'est ainsi que la clémentine, qui dispose aujourd'hui de 2,5 m de linéaire en magasin, sera sur un pied d'égalité avec le topinambour présent en linéaire avec seulement un colis. » « Le rayon est sur le site », confirme de son côté Arnaud Coursault. Selon Frédéric Joan, « il est primordial d'adapter les conditionnements aux besoins des consommateurs du drive, pour le tenter et le séduire. On doit travailler à l'élargissement de la gamme et faire des produits que l'on ne trouve pas ailleurs. » Pour ce faire, Charlet dispose dans ses établissements de Bois-Grenier d'un atelier où il conditionne fruits et légumes sous la bannière “Jardins d'ici” en s'approvisionnant auprès de 95 producteurs locaux. Un atelier qui pourrait répondre davantage aux aspirations des clients du drive ?

Le lancement des paniers bio

Le drive, un moyen d'accroître l'audience des « petits produits » ? Peut-être. C'est du moins ce que pense Bernard Bourdon en soulignant que « tous les produits sont éclairés de la même façon », contrairement au linéaire où la scénarisation peut différer d'un produit à l'autre. Alors, il faut adapter le conditionnement.

C'est le cas, par exemple, avec le raisin proposé par 500 g ou avec les tomates cœur-de-bœuf associées et conditionnées par deux, des bananes (une main de six fruits) ou des carottes Priméale. « Nous avons décidé d'emballages spécifiques en concertation avec certains de nos fournisseurs », précise, de son côté, Arnaud Coursault.

Pour éviter de stocker des pondéreux comme la pomme de terre, le drive a obligé le développement de la vente à la pièce, que ce soit pour les pommes et poires ou les agrumes (citrons, oranges…) ou alors pour des légumes comme les courgettes ou les aubergines. En ce qui concerne la pomme de terre, Chronodrive propose des barquettes filmées, des filets de 2,5 kg, du 5 kg, du 2,5 kg bio et un premier prix de 1 kg… Pour le pondéreux, le drive doit tenir compte de la contrainte “surface”. S'il ne peut contrer des enseignes comme Grand Frais, Carré des Halles ou Partisan du Goût (groupe Auchan), il peut néanmoins proposer une offre diversifiée comme les paniers bio.

« La gamme de fruits et légumes bio se développe plus dans les drives que dans nos magasins », souligne Bernard Bourdon. Un développement logique quand on connaît la typologie particulière des clients du drive qui veulent souvent « donner du sens à leurs achats ».

Après Bordeaux et Tours, Chronodrive lance aujourd'hui des paniers bio de 3 kg de fruits et légumes contenant un produit oublié, les “indispensables de l'hiver” et des informations variétales en plus. Et pour l'approvisionnement ? Ni Aprobio, ni les Jardins de Cocagne implantés à Villeneuve-d'Ascq, ni Fort & Vert ne seraient à l'origine de cette nouvelle filière proposée par Chronodrive en Nord-Pas-de-Calais… Du côté des dirigeants de l'enseigne, on veut garder le secret pour assurer une longueur d'avance sur les concurrents !

AUCHAN ET LES DRIVES

Les drives en Nord-Pas-de-Calais

A fin janvier 2013, on recensait 90 drives en Nord-Pas-de-Calais (dont 6 hors grandes enseignes alimentaires) : 29 drives solos pour une surface de 40 000 m2 et 67 drives accolés ou en picking magasin.

Auchan y domine ce segment avec 30 % des drives, suivi par Leclerc (25 %) et Carrefour (18 %).

Les drives en France

Auchan possède 81 Auchan Drive en France, 2 au Luxembourg et prévoyait, en juillet 2013, d'en ouvrir 11 d'ici à fin 2013. Il possède aussi 62 Chronodrive et désirait en ouvrir 11 à fin 2013. Sa part de marché est de 40 % en France (23 % pour Auchan Drive et 17 pour Chronodrive).

A mi-juillet 2013, les deux enseignes avaient réalisé, en cumulé, un chiffre d'affaires de 816 M€, dont 356 M€ pour Chronodrive.

Avec plus de 5 300 salariés (1 200 embauchés en 2012), il visait, depuis la création des deux enseignes, les 2 millions de clients à la fin 2013 pour un chiffre d'affaires attendu de 1,07 Md€.

“DRIVE FERMIER”, LES PETITS DRIVES QUI MONTENT…

Un an après le lancement du premier Drive Fermier, un quatrième point de retrait s'est ouvert. Le dernier “Drive Fermier” rural est né à La Réole, dans le Sud Gironde. Il s'ajoute aux trois points de retrait sur la Communauté urbaine de Bordeaux (Eysines, Lormont et Gradignan). Fruit d'une initiative de la Chambre d'agriculture de Gironde et du Relais Agriculture et Tourisme, en partenariat avec l'APCA, ces drives s'appuient sur la première boutique virtuelle de produits fermiers girondins. Les f&l sont les “produits phares” des 200 références disponibles. En un an, près de 5 700 personnes inscrites, plus de 200 commandes/semaine, près de 600 références produits. Quant au petit dernier à La Réole, son site dédié fonctionne « comme une place de marché », indiquent les initiateurs. « Celle-ci est ouverte toutes les semaines et chaque mardi les personnes inscrites sur le site sont prévenues par un e-message personnel. » Il est possible de passer commande 24h/24pour une livraison le vendredi après-midi sur le site de retrait ouvert via la Mairie de La Réole, partenaire de l'opération. Il n'y a pas de montant minimum, « la seule contrainte porte sur la commande qui doit être faite avant mercredi minuit si le client souhaite être livré le vendredi de la même semaine. » Treize producteurs locaux dont une productrice de fraises, deux arboriculteurs, respectivement producteurs de nectarines et de pommes, et deux maraîchers y proposent plus de 150 références. Ces drives fermiers essaiment dans toutes les régions, le dernier en date concerne la Mayenne.

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