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AUBERGINE
Le greffage pour des agrosystèmes durables

La diversification génétique des porte-greffes, notamment d’aubergine, améliore le niveau de résistance aux bio-agresseurs telluriques, champignons et nématodes. Elle permet également d’envisager la rotation des porte-greffes.

« Le greffage est un levier pour aller vers des agrosystèmes durables ». Ce constat réalisé par Claire Goillon, Aprel, lors des rencontres techniques phytosanitaires Ctifl/ SDQPV, porte sur le contrôle des bio-agresseurs telluriques de l’aubergine et du concombre (Verticilliose, nématodes, anthracnose.). Comme le suggère le projet Gedubat, la gestion des bio-agresseurs telluriques est construite autour de trois grands axes : l’augmentation de l’activité biologique des sols (apport de matière organique, engrais verts…), la réduction de l’inoculum tellurique (solarisation, plantes pièges, retrait des racines…) et la stimulation de la plante (résistances génétiques, greffage, SDP…). Le greffage, en permettant la culture d’une plante sensible, est une opportunité pour se protéger des bio-agresseurs telluriques.

Une diversité génétique intéressante en Aubergine

Le greffage est très développé en culture de tomate hors-sol pour améliorer la performance des variétés et représente 90 % des plantations selon une enquête Geves-Ctifl de 2015. Sur aubergine et concombre produits en sol, il est surtout développé pour des raisons sanitaires et représente moins de 50 % des surfaces d’aubergine et 30 % de concombre. Pour ces cultures, le choix du porte-greffe a souvent été laissé aux pépiniéristes. Pour le concombre, il se concentre autour de deux ou trois variétés hybrides de courge (C.maxima x C.moschata). Pour l’aubergine, deux à trois porte-greffes hybrides de tomate Solanum lycopersicum sont utilisés (Beaufort, Maxifort, Emperador) et plus récemment Solanum torvum depuis les années 2000. Toutefois, des essais réalisés avec les Ceta Durance Alpilles et Ceta d’Eyragues ont permis d’évaluer la diversité génétique des porte-greffes existants pour l’aubergine, selon leur comportement physiologique et la résistance aux complexes de bio-agresseurs telluriques. Ainsi, onze variétés de porte-greffes ont été testées sur deux ans sur la variété Black Pearl, avec le porte-greffe Beaufort en témoin. Parmi elles, sept variétés sont des hybrides detomate (KNVFFr) (comme Beaufort) dont Kaiser, Fortamino, Brigeor, Aligator, Maxifort, Protector, trois de l’espèce Solanum torvum dont STT3, Espino et Black Angel et un porte-greffe Inra de l’espèce Solanum aethiopicum. Ces porte-greffe présentent des niveaux de résistance variables.

Des niveaux de résistance variables

Les porte-greffes tomates (Solanum lycopersicum) ont été sélectionnés pour leur résistances aux corky root (K), nématodes méloidogynes (N), verticilliose (V), fusariose (F) et fusariose racinaire (Fr). Appelés communément KNVFFr, ces porte-greffes, à force d’utilisation, voient leurs résistances contournées, notamment par des souches ou races plus virulentes de nématodes et de verticilliose. C’est pourquoi les cultures d’aubergine même greffées sont aujourd’hui très affectées par ces pathogènes. L’espèce Solanum torvum présente sur le terrain une très bonne tolérance aux nématodes, à la verticilliose et aux autres champignons telluriques (corky-root, Colletotrichum coccodes). Cette résistance n’est cependant pas totale car des cas de contamination ont pu être observés dans certaines conditions. L’espèce Solanum aethiopicum est ressortie du screening de porte-greffes réalisé par l’Inra de Montfavet au cours du projet Vasculeg comme présentant un bon niveau de résistance à la verticilliose L’essai a été réalisé en 2016 dans une parcelle de production, dans deux tunnels plastique présentant des pressions différentes concernant les bio-agresseurs telluriques. L’un à pression sanitaire moyenne entraînant 5 % de mortalité des plants et l’autre à forte pression avec 45 % de plants affectés. « Les résultats montrent un bon rendement pour S.torvum quel que soit le niveau de pression », mentionne Claire Goillon. La spécialiste note l’arrêt de production précoce avec les porte-greffes tomate (Solanum lycopersicum) dans la situation de forte pression. « Sur tous les porte-greffes tomate, la végétation est marquée par des chloroses, voire des nécroses alors que S.torvum reste vert », précise-t-elle.

Nouvelles pistes de choix de porte-greffe

Dans la parcelle à pression sanitaire moyenne, les résultats ne donnent pas de différence significative sur le rendement final. En revanche, Beaufort se révèle comme le porte-greffe le moins endurant avec une production faible à partir du mois de juillet, alors qu’après un démarrage lent, S.torvum assure une meilleure production en fin d’été. « Les besoins de température de ce porte-greffe sont importants et ils lui permettent de mieux s’exprimer en deuxième partie de culture et de rejoindre les autres références en rendement final », commente Claire Goillon. Au niveau des résistances aux bioagresseurs telluriques, S.torvum est réellement plus performant que les porte-greffes tomates sur cet essai : il ne présente aucune galle de nématode et de rares nécroses racinaires. Parmi les porte-greffes KNVFFr, Aligator se démarque par un niveau de contamination plus faible que les autres. « En aubergine, il existe un potentiel de réorientation variétale pour les porte-greffes », analyse la spécialiste. En effet, cette diversité génétique permet d’envisager une rotation de porte-greffes pour limiter la pression sanitaire et le contournement des résistances. Sur le plan agronomique, l’utilisation de ce matériel génétique nécessite des adaptations techniques. Ainsi, la longueur du cycle de production (germination + croissance du plant) de S. trovum, et encore plus de S. aethiopicum, demande des délais de mise en pépinière différents de la variété et contraint à anticiper les commandes auprès des pépiniéristes.

Les différents porte-greffes d’aubergine(1)

Solanum lycopersicum (Hybrides de tomate)

Peu d’écarts de production entre variétés.

Des nuances de vigueur et de chloroses mais peu différenciées.

Des chloroses marquées

La variété Aligator se démarques par un niveau de tolérance supérieur au complexe de bioagresseurs telluriques

Solanum torvum

Intérêt confirmé pour un très bon niveau de tolérance aux bioagresseurs telluriques, même en condition de forte pression

Très bonne adéquation physiologique avec l’aubergine

Contrainte de pépinière et de température

(1) Selon les essais conduits par l’Aprel

Peu de diversité pour les cucurbitacées

Des essais similaires en concombre ont permis de tester le niveau de résistance de neuf porte-greffes commerciaux aux bio-agresseurs telluriques, notamment les nématodes en comparaison au témoin TZ 148 porte-greffe de Diapason. « Contrairement à l’aubergine, nous n’avons pas noté de différence sur leur résistance aux bio-agresseurs telluriques. Et même si TZ 148 et SR2216 se démarquent par un peu moins de second choix, 27 et 30 %, il n’y pas non plus de différence significative sur le rendement », résume Claire Goillon.

Enfin, la courgette a également été étudiée. Le greffage est réalisable sur les même porte-greffes que le concombre mais n’est pas pratiqué car son coût est trop important. Cependant, les essais ont montré de très bons résultats en condition de forte pression fusariose. Cette démarche technique serait à valider sur le plan économique

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