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Cassis : de nouveaux enjeux techniques

Si l’oïdium, l’anthracnose et les pucerons restent les bioagresseurs les plus fréquents en cassis, de nouveaux enjeux techniques apparaissent. Le désherbage, la pollinisation et la cochenille préoccupent les producteurs.

En France, 150 producteurs exploitent 2 000 ha de cassis en Val de Loire, Bourgogne, haute vallée du Rhône et Oise. Bien que les producteurs aient investi pour sécuriser les rendements (irrigation, entretien, renouvellement des plantations), la production reste très variable selon les conditions de l’année (gel, pluie lors de la nouaison, fortes chaleurs avant la récolte…). « Après deux années de forte baisse due aux gels de printemps, la filière espère cette année une récolte normale, d’environ 7 000 tonnes », a indiqué Florent Baillard, président de l’Association nationale cassis groseille, lors du Congrès mondial du cassis qui s’est tenu en juin à Angers.

Désherbage mécanique ou thermique

Un enjeu essentiel, notamment les deux premières années, est la maîtrise des adventices. Si l’enherbement contrôlé entre rangs se généralise pour réduire l’emploi d’herbicides et améliorer la portance, le désherbage sur le rang reste problématique. Les derniers herbicides utilisables étant amenés à disparaître ou étant insuffisants, les producteurs s’intéressent à d’autres solutions. Des essais sont menés sur des paillages en polyéthylène ou en film tissé. Les producteurs se penchent aussi sur le désherbage mécanique, les bineuses classiques étant toutefois peu adaptées au cassis du fait de la conduite en buisson et des racines très superficielles du cassissier. Des constructeurs commencent cependant à s’y intéresser. Lors du congrès, Kult a présenté ainsi un châssis bas, adapté aux plantations en buisson, équipé sur les côtés de sarcleuses étoiles, qui ouvrent le sol sur 1 à 3 cm de profondeur, et de doigts Kress qui binent le rang. Vermande a exposé un enjambeur à voie variable équipé de deux relevages avant sur lesquels est installé un outil de binage mis au point par la Sarl Franck Haye. L’outil est équipé de deux déflecteurs en tôle espacés de 50 cm, qui relèvent la végétation pour permettre un binage superficiel au pied des plants. Le désherbage thermique est une autre solution. Dev a présenté son système de désherbage à la vapeur sèche. La société, qui propose actuellement le système pour les espaces verts, travaille sur un outil équipé de deux rampes adapté au cassis.

La pollinisation est une autre difficulté pour les producteurs. La variété Noir de Bourgogne, la plus utilisée en Bourgogne, et très cultivée aussi ailleurs, est auto-incompatible et nécessite la plantation de variétés pollinisatrices. Toutefois, la plupart des variétés de cassis sont aujourd’hui auto-fertiles. Mais la fleur étant petite, en clochette tournée vers le bas, avec un nectar peu sucré peu attractif pour les insectes, la pollinisation reste aléatoire. « Si les pollinisateurs sont insuffisants, la fructification peut être réduite de 50 à 60 % et la taille des fruits de 10 à 20 % », souligne Bernard Vaissière, de l’Inra. La plupart des producteurs utilisent donc aujourd’hui des ruches d’abeilles ou de bourdons. « Mais il ne faut pas compter que sur les ruches, insiste Bernard Vaissière. Il est important aussi de gérer les populations d’abeilles sauvages qui ont une meilleure efficacité en termes de germination du pollen que les abeilles mellifères. »

Lutte biologique contre la cochenille blanche

Autre problème important : la cochenille blanche. « La moitié des plantations en France sont aujourd’hui concernées par ce ravageur qui peut réduire le rendement de 50 % et entraîner un vieillissement prématuré des plants, indique Philippe Guignebault, de la Morinière. La lutte chimique est peu efficace parce que les produits homologués sont peu nombreux et que la cochenille blanche est recouverte d’un bouclier qui la protège. » Des essais de lutte biologique basés sur une coccinelle, Rhyzobius lophanthae, ont donc été engagés dans le cadre du projet Rhizodia 2016-2018. « Rhyzobius lophantae est spécifique des cochenilles, vit à l’état naturel dans les vergers et se transporte facilement. Les périodes les plus adaptées pour en apporter sont les périodes d’essaimage de mai et d’août, la cochenille n’étant alors pas protégée par un bouclier. Les essais montrent toutefois que Rhyzobius lophantae n’hiberne pas dans les parcelles et qu’elle doit donc être utilisée comme un traitement. La difficulté est que si l’on n’utilise pas d’insecticide, il peut y avoir des problèmes importants de puceron et cécydomies. La stratégie pourrait donc être d’intervenir en pré-floral contre ces ravageurs puis d’apporter Rhyzobius lophanthae au 2e essaimage. »

Le phytopte, acarien contre lequel les producteurs français ne disposent désormais plus d’acaricide, devient problématique. « Certaines variétés comme Andega y sont très sensibles. Le soufre, qui est en cours d’homologation, montre toutefois une très bonne efficacité. La stratégie pourrait être de l’apporter en pré-floral, en adaptant les doses aux températures », indique Philippe Guignebault.

A savoir

Cultures associées

Aux Etats-Unis, la culture du cassis a été longtemps interdite, l’espèce étant hôte de l’agent pathogène responsable de la rouille du pin blanc. Depuis quelques années, la culture est autorisée et des recherches sont menées sur sa production. Des essais ont notamment été engagés pour produire du cassis en association avec des châtaigniers ou des noisetiers qui mettent plusieurs années à entrer en production. Deux rangs de cassissiers, suffisamment espacés pour permettre la récolte mécanique, sont implantés entre deux rangs d’arbres. Des groseilliers, récoltés manuellement, sont plantés sous les arbres. Et entre les rangs de cassis, les chercheurs ont installé un rang de rhubarbe qui est récoltée en mai, avant la récolte du cassis.

Avis de producteur

Marc Ludeau (Les Rosiers-sur-Loire, 49)

« Avec mon frère Franck, nous cultivons 30 ha de cassis des variétés Blackdown, Noir de Bourgogne et Andorine, variété tolérante à l’oïdium. Depuis l’arrivée des premiers contrats en 1998, pour sécuriser les rendements, nous avons investi en irrigation, entretien et replantation. Nos principaux problèmes aujourd’hui sont les aléas climatiques et la cochenille, qui a beaucoup réduit la durée de vie des plants. Chaque plantation est désormais renouvelée tous les dix ans. Le désherbage est également un gros problème. Le cassis ayant des racines superficielles, il ne supporte pas la concurrence des adventices. Et dès qu’il est développé, la forme en buisson complique le désherbage sur le rang. L’entre-rang est enherbé avec un mélange ray-grass fétuque pour améliorer la portance des sols pour les passages des tracteurs et vendangeuses et pour favoriser les auxiliaires. Sur le rang, la maîtrise des adventices était assurée jusqu’ici par des herbicides. Mais ces solutions étant amenées à disparaître et pour une production plus raisonnée, nous testons actuellement du paillage plastique et nous nous intéressons au désherbage à la vapeur sèche. Pour la pollinisation, nous louons désormais 40 ruches que nous installons pendant trois semaines parmi les cassissiers. Depuis que nous le faisons, nous n’avons plus d’accident de pollinisation et les rendements sont beaucoup plus réguliers. »

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