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L’Espagne sous les tropiques

Le sud de l’Espagne connaît un climat favorable à la production d’avocat. Une production datant de 40 ans devenue majeure dans la région. Elle a permis le développement d’entreprises telles qu’Eurofresh, spécialisée dans la production biologique.

Kiko (au centre) est le pionnier de la production d'avocats bio en Espagne. Une production complétée par des mangues.
© G. Dubon

Le vent marin souffle sur les collines de la vallée du Vélez, dans la province de Malaga. A perte de vue, des vergers. Des vergers d’avocatiers. Et la sierra Nevada comme toile de fond. « Il n’y a plus un mètre carré où planter des avocatiers ici », raconte Francesco Francesco Claros, dit Kiko. Ce quadragénaire est le pionnier de la production d’avocat bio en Espagne. De son grand-père il a hérité des premières parcelles d’avocats d’Espagne, de sa conviction pour le bio et un grand sens de l’entreprenariat. « J’ai commencé avec ses 20 ha d’avocat. Maintenant Eurofresh, mon entreprise, en produit en propre sur près de 500 ha dans cinq pays », annonce-t-il. En Espagne, il en possède 60 ha sur cette bande de terre d’une quarantaine de kilomètres de large coincée entre mer et montagne. La production espagnole d’avocat se concentre à 80 % entre Marbella et Almeria. « Nous avons ici un microclimat similaire au climat tropical, parfait pour les avocats, précise le producteur. Le seul danger, c’est le gel. » Sous -4°C, les arbres perdent leurs fruits qui se récoltent en hiver et leurs feuilles sèches. La zone a tendance à s’étendre à l’Est et à l’Ouest mais selon le producteur, les conditions climatiques y sont moins favorables. Près de 12 % de la production espagnole proviennent aussi des Iles Canaries. En tout, l’Espagne possède 10 000 hectares de vergers d’avocatier. Les volumes produits oscillent entre 40 000 et 60 000 tonnes selon les années.

Une gestion précise de l’eau

Sous la frondaison des premiers avocatiers d’Espagne de plus de 45 ans, le producteur expose avec passion ses choix techniques et entrepreneuriaux. « Comme ce verger d’avocatiers est conduit en bio depuis toujours, il n’est pas si difficile de le gérer. En favorisant la faune auxiliaire et en gérant bien l’eau, on arrive à diminuer de 85 % les problèmes de maladies et ravageurs observés en agriculture conventionnelle. » Le principal ravageur est un acarien, maîtrisable par la faune auxiliaire. Le phytophtora est le pathogène le plus dangereux. « Des recherches sont faites pour trouver des porte-greffes tolérants dont certains se trouvent sur notre plus vieille parcelle », note avec amusement Kiko. Sa maîtrise passe aussi par une bonne gestion de l’irrigation. L’eau est donc un point crucial dans la gestion de son exploitation, surtout dans une zone sujette à des périodes de sécheresse. « Nous avons trois ressources, des puits et deux retenues communautaires gérées par la communauté autonome d'Andalousie », détaille l’ingénieur agronome. Quand leur tour d’eau arrive, l’eau est stockée dans des réservoirs. Son utilisation est maîtrisée à 100 % par une personne dédiée à la ferti-irrigation. Il la pilote grâce à des tensiomètres connectés à une application, afin de pouvoir moduler les programmes d’irrigation à tout moment. « On donne ainsi aux arbres juste ce dont ils ont besoin. » Si l’eau d’irrigation et les fertilisants sont distribués en goutte-à-goutte, des sprincklers permettent aussi d’abaisser les températures des vergers de 3° à 4°C en été et de les augmenter en hiver en cas de risque de gel.

Une conduite à haute densité

Trois variétés sont produites, Hass à la peau sombre et grumeleuse la plus connue des consommateurs français, Fuerte et Bacon à la peau verte et lisse. « Les variétés vertes ont un intérêt essentiellement pour la pollinisation de Hass. » Elles sont récoltées en novembre-décembre et la récolte de Hass s’étale de janvier à avril. Chaque arbre est récolté en deux passages à deux mois d’intervalle. Les récoltes sont déclenchées en mesurant le taux de matière sèche qui est corrélé au taux de matière grasse. « Nous visons un taux de 23 % afin de pouvoir proposer ces avocats pour notre gamme prêt à manger développé par Eurofresh (voir sous papier) », indique Silvia Madrueno, coordinatrice commerciale pour Eurofresh. La taille se fait juste avant la floraison, en mai, pour contenir l’arbre et réguler l’alternance. Depuis les premières plantations expérimentales entre 50 et 200 arbres à l’hectare, la conduite est maintenant rodée. Les parcelles sont plantées à 1 000 arbres par hectare en limitant les arbres à 2,5 m afin de pouvoir récolter les fruits depuis le sol. « Conduit en agriculture biologique, un verger d’avocat produit 10 à 20 % moins qu’un verger en conventionnel, soit 8 à 9 t/ha, indique Francesco Francesco Claros. Mais sur nos parcelles espagnoles, nous avons atteint 19 t en 2017. » Passionné par son métier, il adore concevoir et développer de nouveaux vergers dans des environnements très différents de sa terre natale. Cet itinéraire technique est donc adapté dans toutes les plantations de Kiko, en République dominicaine, en Colombie et au Pérou.

La mangue, l’autre fruit gras

L’autre fruit tropical qui s’étage sur les flancs des collines malaguènes est la mangue. Aussi rentable que l’avocat du fait de la forte demande du marché, sa conduite est plus coûteuse. « La première récolte se fait trois ans après la plantation contrairement à l’avocat qui produit dès la 2e année, précise Francesco Claros. Ensuite, si les fruits se récoltent de septembre à novembre, une période plus agréable pour les cueilleurs, ils sont très longs à récolter. Il faut revenir sur chaque arbre deux fois par semaine afin de cueillir les fruits juste à la bonne maturité. » De ce fait, la main-d’œuvre représente en moyenne 75 % des coûts contre 50 % pour l’avocat. Les premiers manguiers de la région ont été plantés il y a 20 ans. Les deux principales variétés sont Osteen et Keith.

Eurofresh, le leader de l’avocat bio

Pour commercialiser ses avocats, Francesco Claros a créé Eurofresh il y a 15 ans. « Au début, je n’ai pas pu commercialiser mes avocats en bio car il n’y avait pas de marché. » Maintenant, c’est leur marque de fabrique. L’entreprise commercialise des avocats, dont 90 % sont bio, de plus de 1 000 producteurs, soit 3 000 ha en production réparties en Espagne, République dominicaine, Colombie, Pérou et Maroc. « L’objectif est de fournir à nos clients des avocats toute l’année. Cela permet aussi de diversifier les sources en cas d’aléas climatiques importants qui pourraient réduire la production sur une région. Nous avons au moins deux sources d’approvisionnement par période de production », indique-t-il. Les avocats sont ensuite envoyés dans leur station aux Pays-Bas où ils sont mûris à différents degrés pour proposer diverses gammes de qualité. Leurs premiers clients sont européens. L’Allemagne, la Scandinavie, l’Angleterre, la Suisse et les Etats-Unis sont les cinq premières destinations des avocats d’Eurofresh. Si l’avocat représente 80 % des volumes commercialisés, Francesco Claros a voulu aussi diversifier les produits proposés par son entreprise. Mangue, citron, gingembre, curcuma, patate douce et papaye sont venus s’ajouter à leur catalogue. Avec toujours le souci d’une agriculture durable et équitable. Et l’entrepreneur compte continuer sa progression : « Nous avons généré 35 millions d’euros en 2017, nous allons en faire près de 46 millions en 2018. Mais je vise à doubler ce chiffre d’affaires dans les cinq ans. »

En Chiffres

Production avocat 2015/2016

9 600 ha

85 000 t

6e pays exportateur mondial

Production mangue 2015/2016

5 500 ha

30 000 t

2e pays fournisseur pour l’UE

Source FRuiTRoP

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