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Des pistachiers sur le sol français

Des producteurs provençaux expérimentent une diversification dans le pistachier. Une culture dont la conduite reste encore à affiner. Mais les premières conclusions de ces pionniers sont là.

Comment conduire un pistachier dans les conditions provençales ? Aujourd’hui, les agriculteurs partent sans nul doute d’une page blanche. Pourtant, quelques pionniers ont déjà de précieuses informations, dont certaines ont été présentées lors de la rencontre Innov’Action, dans le Vaucluse, à l’automne dernier. Georgia Lambertin, arboricultrice à Venasque, s’est lancée dans l’aventure de la culture de la pistache depuis un an, pour sécuriser son exploitation. Lors de cette journée, elle a proposé un itinéraire technique, appelé à évoluer, basé sur sa propre expérience et son tour d’horizon technique, réalisé auprès d’experts internationaux. Le pistachier commun, Pistacia vera, est bien adapté au climat provençal. Il apprécie en effet les expositions ensoleillées, les étés chauds, les hivers froids et secs. Il résiste également à la sécheresse et aux gelées modérées. Attention toutefois : un taux d’humidité élevé entraîne des maladies fongiques. C’est pourquoi le pistachier préfère les sols limono-sableux secs et drainants, mais se développe bien aussi sur des sols pauvres, calcaires, fortement alcalins ou légèrement acides. Le pistachier n’aime pas avoir « les pieds dans l’eau ».

Des plants difficiles à obtenir

Seule l’espèce Pistacia vera produit le fruit comestible. Les autres espèces du groupe Pistacia, comme P. atlantica, P. terebinthus, sont utilisables comme porte-greffes. « Pistacia atlantica préfère les sols lourds. Très vigoureuse, cette espèce permet une entrée en production plus rapide, donc un retour sur investissement plus proche », remarque Fadhel Zribi, agronome tunisien. L’obtention de plants de pistachiers par greffage est difficile. « Je suis en train d’identifier des pépiniéristes sérieux, à l’étranger », annonce Georgia Lambertin. Les plants livrés en pots se réservent longtemps à l’avance, en juin de l’année précédant la plantation. La plantation a lieu en hiver, de préférence avant Noël. Le taux de reprise des jeunes plants est supérieur à celui de plants de trois à quatre ans. L’arbre vit 150 à 300 ans.

Récolte et pollinisation

Le pistachier est dioïque, c’est-à-dire que certains arbres portent des fleurs mâles et d’autres des femelles. Les fleurs apparaissent avant la végétation, sous forme de grappes. La pollinisation se fait uniquement grâce au vent. Une bise douce au printemps lui est favorable. « Pour assurer une bonne pollinisation, il est nécessaire d’avoir un arbre mâle (qui ne produit pas) pour huit arbres femelles », préconise la toute jeune association “Pistache en Provence”. « Si les périodes de floraison mâle et femelle n’ont pas été synchrones, et si le verger n’est pas trop grand, une intervention humaine complémentaire peut être faite pour s’assurer de la pollinisation complète : saupoudrer un mélange de talc agricole et de pollen sur les fleurs femelles. Pour optimiser la production, donc éviter de perdre des grappes, nous conseillons de choisir une variété mâle dont la floraison couvre toute la floraison femelle. Des astuces de plantations favorisent également la pollinisation. Planter en croix : un mâle au centre de huit femelles, et positionner une haie de pistachiers mâles, dans le sens du vent dominant. Enfin, tailler les arbres mâles en port érigé contribue aussi à une meilleure pollinisation », conseille Fadhel Zribi. Les premiers fruits apparaissent au bout de trois ans, pour une récolte pleine au bout de cinq ou six ans. La récolte des pistaches se fait cinq à six mois après floraison, soit début septembre en conditions provençales. Le rendement moyen minimal est estimé à 5 kg/arbre/an, en année pleine.

Tailler, fertiliser, irriguer

La taille de formation des arbres dépend du choix du type de récolte, manuel ou mécanique (avec tracteur et vibreur). La taille annuelle reste légère et peut être mécanisable. Elle concerne seulement les pieds femelles. Aucun éclaircissage n’est pratiqué. La récolte se fait au moment de la déhiscence, c’est-à-dire de l’ouverture de la coque. Elle peut être mécanique, par secouage avec machines à vibrations et ramassage des fruits sur tapis roulants. En Tunisie, les pistachiers ne sont généralement pas irrigués. Mais le pistachier répond très bien à l’irrigation, son rendement en est très amélioré. « C’est d’ailleurs ce qu’ont compris les Etats-Unis, dont les surfaces de pistachiers se sont si fortement développées depuis les années 1970 », analyse l’agronome. L’irrigation est notamment conseillée lors de la plantation, pour favoriser un développement rapide du jeune plant. Dans ce cas, l’installation de quatre goutteurs par arbre, distants d’un mètre est préconisée. Elle est aussi primordiale en juillet et août, lorsque l’amande grossit. « Contrôler l’évapotranspiration au moyen de sondes est à envisager », précise aussi Georgia Lambertin.

Cécile Poulain

Ravageurs et maladies

Le pistachier est sujet à des attaques de ravageurs et de champignons cryptogamiques. « Un conseil préventif est de bien extraire les racines des cultures précédentes avant la plantation des pistachiers. Un passage au cuivre, demi-dose à l’automne et dose pleine en hiver permet d’enrayer les maladies. Le pistachier est sensible aussi aux campagnols », observe Georgia Lambertin, productrice dans le Vaucluse. En Tunisie, les pistachiers redoutent principalement Eurytoma plotnikovi, un insecte qui « pique » les fruits. Les larves s’y développent et se nourrissent de l’amandon. Les fruits se dessèchent mais restent accrochés sur l’arbre. Il faut donc enlever ces fruits infestés de larves. Cette opération permet de les détruire et d’éviter une infestation de la récolte suivante. « La septoriose est la maladie affectant le plus les pistachiers », observe de son côté Fadhel Zribi, « de petits points marron apparaissent sur les feuilles, qui jaunissent puis meurent. Ramasser les feuilles et les brûler permet alors de détruire ces sources de contamination potentielles. La chute prématurée des feuilles entraîne une baisse de vigueur et des fruits de petit calibre. Durant l’hiver, un traitement à base de cuivre suffit à protéger la culture. Enfin, une autre maladie fongique peut attaquer le pistachier : il s’agit de l’alternariose, due au champignon Alternaria, qui provoque des sortes de piqûres de mycélium sur fruits. Les dégâts peuvent conduire à la nécrose de toute la grappe. Un traitement hivernal au cuivre est conseillé en prévention. »

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