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Biocontrôle : 3 points clés pour optimiser son efficacité

Les producteurs perçoivent un manque d’efficacité des produits de biocontrôle, qui constitue un frein majeur à leur plus large utilisation. En respectant certains principes essentiels, l’efficacité des produits peut néanmoins être largement améliorée.

Les produits de biocontrôle doivent être appliqués dès l'apparition des premiers ravageurs ciblés.
Les produits de biocontrôle doivent être appliqués dès l'apparition des premiers ravageurs ciblés.
© Aprel

La perception des utilisateurs quant à l’efficacité des produits de biocontrôle à base de micro-organismes n’est pas suffisamment bonne. C’est ce qui ressort d’une enquête INRAE, réalisée dans le cadre d’une thèse. Selon cette enquête, les conditions d’utilisation optimales des produits de biocontrôle ne semblaient être que partiellement connues par les utilisateurs. Lors du Sival 2022, Maxime Chabalier, conseiller en maraîchage à la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire, mettait en avant l’importance de bien se renseigner sur les produits. « Un produit ayant une très bonne efficacité sur Pythium sera homologué contre les Pythiacées. Or, son efficacité n’est peut-être bonne que sur un type de souche bien spécifique… »

Pour obtenir une efficacité pleine des produits de biocontrôle, certains facteurs de réussite sont communs à toutes les solutions, tandis que d’autres sont spécifiques à chaque produit. « Le biocontrôle s’intègre dans une stratégie globale de protection qui comporte différents leviers », rappelle Mathilde Roger, cheffe de projet cultures spécialisées chez Certis Belchim, lors d’une conférence du Sival 2023. Les leviers agronomiques sont ainsi essentiels dans la réussite du biocontrôle (voir encadré). Sur le biocontrôle en lui-même, trois points essentiels sont recommandés pour une application la plus efficace possible. « Il faut agir au bon moment vis-à-vis du bioagresseur, soigner sa qualité de pulvérisation et comprendre les spécificités du produit choisi », énumère Mathilde Roger.

1. Agir au bon moment vis-à-vis du bioagresseur

Le principe général du biocontrôle est d’intervenir tôt. Dans le cas des maladies, le principe est de traiter toujours en préventif. Pour cela, il faut connaître et suivre les conditions qui leur sont favorables. « En cas de pression très forte, notre recommandation est de repasser en conventionnel si le cahier des charges le permet, avant de revenir au biocontrôle », indique Mathilde Roger. Pour les ravageurs, l’idée est de traiter à l’apparition des premiers individus. « Quand on traite une population déjà nombreuse, on rate forcément plus de cibles lors de l’application, poursuit-elle. Les ravageurs peuvent avoir un développement exponentiel, en particulier les piqueurs-suceurs. Si on part avec beaucoup de cibles, celles-ci seront plus difficiles à contrôler. »

De plus, le bon moment d’intervention peut aussi être défini par le stade biologique du ravageur ciblé : certains produits n’agissent que sur les œufs, d’autres que sur certains stades larvaires, d’autres encore que sur les adultes. Le principe de traiter à l’apparition des premiers individus exige une observation précise et fréquente. « Il peut être utile d’observer les endroits les plus avancés dans la serre, par exemple là où il fait le plus chaud et donc où les populations augmentent en premier », conseille Mathilde Roger. Si les populations sont trop importantes au moment de l’intervention, il est important de resserrer les cadences des applications à « 3-4 jours plutôt que 7-10 jours ». « Le fait de resserrer les cadences peut obliger à alterner les produits pour respecter leurs conditions d’application inscrites dans les autorisations de mise sur le marché (AMM) », précise-t-elle.

2. Soigner sa qualité de pulvérisation

« Cet aspect est très important car la plupart des produits de biocontrôle sont des produits de contact. Le ravageur doit donc recevoir directement le traitement. D’autre part, comme les produits de biocontrôle ne sont pas ou peu rémanents, tout se joue lors du traitement », analyse Mathilde Roger. La qualité d’application est encore plus essentielle pour les produits de biocontrôle que pour les produits conventionnels, en termes de recherche d’efficacité. Il est donc très important de vérifier la qualité de pulvérisation, par exemple à l’aide de papiers hydrosensibles. Le produit doit atteindre tous les endroits où sont présentes les cibles : faces inférieures des feuilles, cœur de la végétation… « Il faut viser une couverture d’au moins 80 % de la surface des papiers hydrosensibles », conseille Mathilde Roger. La qualité peut être optimisée par les réglages, l’augmentation du volume d’eau, ou éventuellement un changement de matériel.

 

3. Comprendre les spécificités du produit

Chaque produit de biocontrôle a un mode d’action très précis. « Pour que ce mode d’action puisse se réaliser, on doit respecter un certain nombre de conditions, qui découlent directement des caractéristiques de la matière active », décrit Mathilde Roger. Au niveau des conditions climatiques lors de l’application par exemple, les produits n’ont pas tous les mêmes exigences. « Un de nos produits a besoin de sécher lentement. On a donc une recommandation d’application le matin après tout risque de rosée, illustre-t-elle. Un autre doit sécher très vite, il faut donc plutôt l’appliquer le midi ou fin de matinée. Un troisième, à base de champignons entomopathogènes, a besoin d’une forte humidité pendant plusieurs heures après l’application et il doit être protégé des UV. Il doit donc être appliqué le soir. » Pour trois produits distincts, on a donc trois moments d’application différents pour que leurs modes d’action particuliers puissent se réaliser.

Les mélanges et l’eau utilisée sont aussi des points de vigilance. « L’acide gras a la capacité de se faire complexer par des ions métalliques. Il ne faut donc surtout pas mélanger les produits à base d’acide gras avec du cuivre par exemple, avertit Mathilde Roger. Il faut aussi faire attention à la dureté de l’eau. Les ions calcium et magnésium captent la matière active, réduisant donc l’efficacité du produit. » Attention donc également au pH de l’eau, un pH trop acide pouvant réduire l’accessibilité de la matière active. Dans le cas des produits à base de champignons entomopathogènes, ils ne peuvent pas être mélangés avec un produit ayant un effet fongicide, qui risquerait de tuer le champignon avant qu’il n’ait le temps d’agir.

Une approche multicouche de la protection

Un manque ou un excès de fertilisation peut mener à un échec des produits de biocontrôle.
 

Pour que le biocontrôle puisse montrer une efficacité suffisante contre les ravageurs et maladies, il doit s’intégrer au sein d’une approche multicouche de la protection. « Le biocontrôle est un des leviers à actionner, mais les autres sont tout aussi importants », insiste Maxime Chabalier lors du Sival 2022. Le conseiller en maraîchage à la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire identifie plusieurs de ces couches à superposer dans la stratégie de protection, avec tout d’abord la rotation et les choix variétaux. Puis vient le volet sol, « souvent trop négligé ». « Une plante qui se développe mal, dans de mauvaises conditions, va être plus sujette aux ravageurs », avertit Maxime Chabalier.

Une fois qu’on a maîtrisé sa rotation et son sol, viennent la fertilisation et l’irrigation. « Si la culture est mal fertilisée, la plante va être stressée, indique le spécialiste. Les carences vont augmenter la pression en maladies et ravageurs. De plus, en cas d’excès de fertilisation, les ravageurs peuvent être plus actifs et se reproduire davantage. Dans ces conditions, on peut avoir un échec total de la protection biologique intégrée (PBI) et des produits de biocontrôle. » La détection des bioagresseurs et l’utilisation de règles de décision sont deux autres leviers majeurs de cette approche multicouche de la protection des cultures.

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